Bonjour,
J'aimerais savoir si vous connaissez l'origine de cette image française persistante de cette remarque souvent ironique donnée par mon entourage :
"Les sumôs au Japon, ce sont des Dieux !" ?!
Certes, je veux bien que le shintoïsme tiens une part très importante dans ce sport et que les rikishis sont "assez" populaires mais de là à proclamer que ce sont des Dieux...
Selon moi il s'agit d'un cliché provenant d'un amalgame généralement incompris par les non Japonais. Racines religieuses + popularité de sportifs connus + idées reçues sur le Japon, pays bien peu connu.
Pas mieux. Le fait qu'ils soient (ou plutôt aient été) l'objet d'une grande considération, voire vénération, de la part du peuple japonais, pour un ensemble de raisons, font qu'en France certains journalistes ont tendance à faire l'amalgame avec le côté divin que l'oçn rencontre dans beaucoup d'expressions ("Ronaldo est un Dieu du ballon rond"), mais là à le faire prendre au premier degré du fait même de cette "grande religiosité/spiritualité" supposée des Japonais. A l'arrivée, cette question que j'entends au moins une fois par semaine, et que tu posais en liminaire...
Il n'y a pas que pour le sumo :
"En Argentine le football est une religion, Maradona en est le Dieu..."
http://topchretien.jesus.net/topinfo/?/16697/
"Il y a aussi les Dieux du stade"
La ferveur populaire crée d'elle-même ce genre d'image.
Bon, je ne suis pas un expert du shintoisme, mais je vais essayer de résumer ce que je sais.
Dans le shintoisme la divinité peut être dans tout, dans un lieu, dans un arbre, dans un animal, ou dans un homme, pour peu qu'il ait des qualités particulières ou extraordinaires. C'est alors un kami, ce qui a été traduit par "dieu" en français, en l'absence de terme plus approprié.
Le caractère sacré d'un lieu, sanctuaire, source, arbre, etc.. est marqué dans le shintoisme par un enclos constitué d'une corde (tsuna).
Les yokozuna sont bien ceints de cette tsuna sacrée et réalisent des prouesses extraordinaires, non? Les considérer comme des kami est alors tout naturel...
Avant de lire ton post j'allais me lancer sur la tsuna moi aussi. Mis-à-part les yokozuna tous les rikishis sont une part essentiel d'un evennement sacré : le shihai (match) qui est (si j'ai bien tout compris) une cérémonie shinto. Ce ne sont pas des dieux mais plutot des assistants d'un pretres (l'arbitre).Envoyé par Tjeri
Là ensuite c'est "si j'ai bien tout compris" pour le shinto.
Le sumo n'est pas qu'un sport ... à quand la comunion (que faisait déjà Kaka en son temp) avant un derby Milan AC - Inter de Milan (qui est déjà appelé le "derby della Madonina", derby de la ste. Vierge en Italien).
Le sumo n'est pas qu'un sport. Certes. J'ai suffisamment défendu ce point de vue. Il conviendra toutefois de relativiser ces aspects "mystiques" en se souvenant qu'à l'origine le sumo est une tentative de rationalisation des combats de rue donnés en spectacle par des ronin dépourvus de daimyo, et qu'à la suite d'interdictions nombreuses en raison des troubles que ces rassemblements pouvaient occasionner, les premiers oyakata du sumo firent donner les combats dans des temples et sanctuaires, en incorporant à cette occasion les aspects shinto qui sont désormais dans le sumo pour pérenniser l'affaire et se garder de toute nouvelle interdiction.
Quant à la tsuna, elle est en effet inspirée des shimenawa qui ornent les lieux sacrés. C'est l'un des premiers yokozuna (Tanikaze je crois, mais je ne suis pas sûr, je vérifierai plus tard) qui s'en ceint un jour pour célébrer une victoire. C'est à lui aussi que fut offert un jour par le shogun un arc en récompense du yusho, avec lequel il dansa. D'où la cérémonie de la danse de l'arc (yumitori-shiki) et le yaku-zumo ni kano, les récompenses accordées aux vainqueurs des combats de sanyaku au dernier jour d'un honbasho (corde, flèches et arc ; on en voit en fait aujourd'hui que les flèches dans l'antépénultième combat).
En espérant ne pas avoir été trop long
Je ne comprends pas toutes ces réponses. Je ne sais plus d'où je tiens ça, peut être du bouquin de Kirishima, ou du documentaire sur le Sumo, mais pour moi cette association Sumo = Dieux a une origine simple et limpide.
D'après ce que je crois savoir, le Sumo prend son origine dans la légende shinto de la création de l'archipel du Japon et son peuple. Après s'être partagé la création du monde, le dieu de l'est et le dieu de l'ouest ont décidé de s'affronter dans un combat loyal ayant pour but de les départager pour savoir à qui reviendrait l'honneur de créer cette terre et ce dernier peuple. Ils ont tracé un cercle sur une plage et ont créé les règles du Sumo : celui qui sortirait du cercle perdrait le combat. Le dieu de l'est l'ayant emporté, cela explique pourquoi le Japon se situe à l'extrême est des terres connues, avant un immense océan.
Depuis ce combat originel les lutteurs de Sumo rendent hommage aux dieux en le reproduisant. C'est la raison pour laquelle ils ne doivent pas montrer leurs émotions, doivent entrer sans armes, etc : lorsqu'ils entrent dans le cercle sacré, ils deviennent en quelque sorte les avatars du dieu de l'est et du dieu de l'ouest, sans arme, sans émotion humaine. On peut faire une analogie avec la religion chrétienne, où ceux qui reçoivent l'hostie reçoivent l' "esprit sain", en quelque sorte le souffle divin.
Bien entendu l'image moderne occulte cet esprit originel, mais je pense que pour les initiés cet esprit est toujours parfaitement présent. Un tournoi de Sumo demeure aussi une cérémonie religieuse et un rite de fertilité et de purification. On a toujours les prêtres, la consécration du dohyo, les gestes rituels, etc.
Je suis surpris de voir que la réponse à cette question n'est pas automatique chez les érudits du site. Je pensais que c'était clair et connu de tous, j'en viens à douter de ma certitude. Pourtant à mes yeux et depuis des années, cela ne fait aucun doute. J'ai même du mal à voir comment on peut comprendre et justifier certaines décisions relativement fanatiques de la NSK sans posséder cet éclairage. Mais c'est un autre sujet je pense. En tous cas, parce que lorsque les lutteurs montent sur le dohyo ils deviennent les avatars des dieux reproduisant ce combat originel, l'amalgame vulgaire a été fait et on pense que Sumo = Dieu au Japon.
Ma foi, peut être que je me trompe finalement, mais en tous cas aucune des autres réponses que j'ai lu ne me satisfait. Affaire à suivre? La flemme de chercher ce soir en tous cas...
Satori
Je partage l'avis de Satori.
A ma connaissance, l'origine des origines correspond à ce premier combat opposant Nomi-no-sukune (géant de 2,35 mètres vainqueur du combat) à Taema-no-Kehaya (de taille plus courante) relaté dans le Nihonshoki (Chroniques du Japon).
Il semblerait qu'une autre version soit développée dans le Kojiki (Chroniques de l'ancien temps) qui opposerait deux kami (divinités). Takemikazuchi qui se serait approprié l'archipel nippon en se défaisant à mains nues de son adversaire Takeminakata.
Dans la première histoire, le jugement divin serait symbolisé par la force physique qui serait l'instrument d'une volonté supérieure (rapport de supériorité du divin sur l'humain). Dans la seconde histoire, de nature mythologique, ce sont directement deux kami qui s'affrontent. Dans les deux cas, les combattants sont considérés comme des divinités.
Après, pour ce que j'en ai compris, les explications formulées par Toonoryu correspondent à l'organisation sociale et religieuse de la pratique du sumo, surtout développée à l'époque médiévale...
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