A mesure que le Japon se mettait à apprécier Konishiki, sa confiance grandit. En novembre dernier il s'est présenté au Kyushu bashosans bandage au genou. Il en portait un depuis six ans. Il l'emporta avec un score de 13-2 et déclara devoir sa victoire, en partie, à un nouveau régime : de la viande de crocodile, hyperproténinique et peu grasse. A aucun moment son poids n'était descendu à moins de 252 kgs.
Quand la clameur salue l'assaut, Konishiki est aussi inarrêtable qu'un train en marche. Et c'est une vision assez effrayante que d'apercevoir les soubresauts de graisse du plus gros sumotori de l'histoire essayer de vous écraser. C'est comme une char d'assaut en face d'une Coccinelle" dit Gasrpar "si vous tenez à la vie, vous vous barrez". Pour une locomotive, Konishiki est capable d'étonnantes prouesses d'équilibre, d'agilité et de force brute.
Pour éviter de terminer aplatis comme des crèpes sous la graisse, les adversaires de Konishiki essayent de le contrer avec rapidité et ruse. Sa plus grande faiblesse résidait dans son incapacité de chager de direction. Il s'élançait depuis sa place de départ, commençait à envoyer des tsupari et des poussées,et juste quand il pensait que son adversaire était prêt pour le Grand Saut, l'autre se baissait, crochetait le genou et l'envoyait s'écraser sur l'argile. "nul ne peut vaincre Konishiki en un contre un. Faut prendre une moitié et contrôler ce que vous avez dans les mains" nous indique Gaspard.
Il existe 74 prises dûment répertoriées pour envoyer un adversaire hors du dohyo, le petit cercle d'argile. A ses débuts, Konishiki s'appuyait sur l'oshidashi et le tsukiotoshi, deux techniques basées sur des coups portés avec la paume de la main. Mais quand il commença à combattre dans les années 80, il perfectionna le yorikiri, technique par laquelle Konishiki attrape à deux mains le mawashi de l'adversaire et le soulève hors du dohyo. La Joie du Sumo, de David Benjamin, appelle celà la position du missionnaire. "ce qui fait la force de Konishiki est qu'il sait conserver son sang-froid. Maintenant, il sait lire la trajectoire de son adversaire. Par le passé, il ne savait qu'aller vers l'avant", nous dit Kuhaulua.
Au basho du mois de mars, à Osaka, le championnat finit par une confrontation entre Konishiki et l'autre ozeki Kirishima, un homme trapu de 140 kgs aux faux airs de star de cinéma (on le présenta au tournoi exhibition de Paris comme le "Alain Delon du Sumo" (ndlr: commentaire de Léon Zitrône...)). En dépit, ou peut-être à cause, de sa taille, Kirishima est l'une des bêtes noires de Konishiki.
Konishiki gravit lourdement le dohyo, portant une légère (? trop technique, pas arrivé à traduire... me faut de l'aide tehnique pour ça). Ses cheveux noirs, huilés, étaient ramenés vers l'arrière et ornementés en un chignon compliqué évoquant la forme d'une feuille de ginko. Konishiki semblait concentré en lui-même. Il avaitune mine sereine et détendue, un visage souriant et distingué. Le regard n'exprimait rien.
Le combat commença avec une longue guerre des nerfs connue sous le nom de niramai, dans laquelle les adversaires se fusillent du regard. "C'est à ce moment que l'on gagne ou que l'on perd" nous dit Konishiki "Si tu peux soutenir le regard de ton adversaire, tu peux le sentir s'effondrer". Parfois, c'est Konishiki qui baisse le regard. "Ton esprit tout entier devient kamikaze, et mec, tu ne connais même plus ton propre nom".
Konishiki et Kirishima se font face, accroupis, se balançant artistiquement sur leurs doigts de pieds. Ils se lèvent, frappent dans leurs mains, puis leurs poitrines et lèvent leurs jambes aussi haut que leurs ventres le permettent. Après bien d'autres frappers du pied, ils lancent une grosse poignée de sel purificateur. Des poignées de sel traversent le cercle en des paraboles chatoyantes. Le jet douche l'arbitre en kimono, qui porte une dague dont il ne se servira pas en représailles, en homme poli qu'il est.
Konishiki est devenu le maître du niramai. Selon La Joie du Sumo, "il gagne beaucoup de ses matches simplement assis ici. Son attiutde est comme un coup de matraque. Il donne l'impression de grandir devant vos yeux."
Les combattants reviennent s'accroupir, et se dévisager d'un air sinistre. Ils se lèvent encore et reprennent d'autres poignées de sel. K et K reprennent le rituel plusieurs fois, comme des hockeyeurs inquiets faisant des cercles avant le face à face. Les spectateurs, dont beaucoup agitent des images de Konishiki, hurlent leurs approbations.
Puis soudain, la charge. Kirishima fonce tête la première dans l'amas gélatineux de Konishiki. Près d'une demi-tonne de muscles, graisse et chanko-nabe s'entrechoquent, dans un "floc" assez curieux à entendre, comme si l'on jetait du beurre sur un mur de béton. Les deux lutteurs frappent ventre contre ventre, tels deux morses en rut luttant pour leur suprématie.
Tout fut fini en dix secondes. Kirishima essaya du désequilibrer Konishiki. Libre de toute prise, Konishiki l'envoya sur le côté du dohyo avec une sorte de grâce pachydermique. Kirishima aggripa une main sur la mawashi de son adversaire et tenta de le contrer. Inamovible, Konishiki aggripa simplement le mawashi de Kirishima et s'en débarrassa sur yorikiri.