Fin de basho « idéale » pour ce Hatsu 2014 : Si le tournoi n’avait pas commencé sous les meilleures auspices avec le kyujo du deuxième yokozuna, Harumafuji, les déconvenues rapides de l’aspirant à la tsuna Kisenosato, et les difficultés du Bulgare Kotooshu dans la reconquête de son grade, le dénouement voit pas mal de lutteurs accrocher un destin auquel ils n’avaient peut-être pas rêvé au shonichi. Mais pas tous, cela dit. En route pour cette dernière chronique de janvier.
Les espoirs de victoire sont statistiquement minces pour Kakuryu avant qu’il n’affronte Hakuho : un score de 30-2 entre les deux hommes ne laisse à priori que peu de place au suspense. Mais l’ozeki est dans une autre dimension depuis le début du basho, et montre pas mal d’habileté, profitant en sus de l’indolence coupable (voulue ?) du yokozuna qui lui laisse un peu facilement décrocher un morozachi aussi profond que la Fosse des Mariannes. A partir de là le suspense ne dure plus, Hakuho se voyant solidement repoussé en arrière. La foule peut exulter (modérément, ça reste deux Mongols), elle tient un kettei-sen. Mais au deuxième combat, Hakuho se montre bien plus saignant, Kakuryu n’ayant aucune opportunité aussi sympathique. A prise de mawashi égale, Hakuho est au final trop fort, et vainqueur. Tout le monde est content : yusho 28 pour le yokozuna qui pourrait bien atteindre les 32 de son mentor d’ici la fin de l’année (et pouvoir être intai en 2015 comme il l’a laissé entendre à mots couverts il y a un certain temps), et Kakuryu se retrouve dans la position pas si fréquente de tsunatori basho en mars, un yusho-doten étant pour la promotion l’équivalent exact d’un yusho.
Shiny Happy People.
Si près, si loin.
On pensait voir cette image bien plus tôt…
Le Roi et son dauphin ?
D’autres lutteurs peuvent être satisfaits de cette journée, à commencer par Goeido. Nerveux, le sekiwake se voit gratifié d’une henka, heureusement stoppée par un matta. Kotooshu se voit lui récompensé de son initiative par une henka, victorieuse celle-là, de son compère qui assure l’essentiel pour lui en cette fin de basho, la conservation de son rang. Katasukashi au terme d’un combat maîtrisé de Tochiozan qui, en battant Tamawashi, s’assure à priori un rang de sekiwake 2e au prochain basho. Assuré d’un sansho, Endo peut en décrocher un deuxième s’il gagne aujourd’hui. Las, il est confronté à Takanoiwa déterminé à sauver sa place en makuuchi. Au terme d’une lutte passionnante, c’est bien le Mongol qui arrache une victoire qui devrait faire la différence, sur shitatedashinage. Endo se consolera avec le kanto-sho et une promotion en joi-jin. Après un début de combat marqué par des nodowa survitaminés de Sadanofuji, Osunaarashi parvient à venir au mawashi, mais se voit repoussé aux cordes par son lourd adversaire. A deux reprises, l’Égyptien surmonte par une résistance titanesque les poussées de son adversaire, qu’il replace au centre. C’est au final sa deuxième tentative en uwate qui lui est fatale, Sadanofuji ayant une stabilité suffisante pour contrer solidement en sukuinage. Beau basho tout de même pour Tempête de Sable qui sera dans le haut de la division en mars.
Gros enjeu pour l’affrontement Shohozan-Toyonoshima, les deux hommes visant la place de komusubi libérée par Myogiryu. Rivés au mawashi, les deux hommes se figent un long moment. Shohozan lance la première banderille, ratée, et manque de se faire contrer par Toyonoshima. Les choses se figent à nouveau, toujours avec un gros uwate droit de Shohozan. Celui-ci tente alors un va-tout, un makikae, mais Toyonoshima, plus expérimenté, a bien vu venir et saisit sa chance pour porter l’estocade. Il sera en sanyaku. Shohozan ne sera pas bien loin, toutefois, puisque la performance de Tochiozan autorise à penser que le komusubi devrait lui libérer sa place pour devenir le troisième sekiwake.
Autre combat gagnant-gagnant entre les deux Mongols Azumaryu, qui devrait être promu en makuuchi après un excellent basho, et Kagamio, qui en battant son compatriote, pourrait se maintenir dans la division. Pas la même musique avec Jokoryu-Tokitenku, la victoire nette en yorikiri du juryo lui accordant la promotion, et sans doute au détriment du Mongol qui devrait être rétrogradé après neuf années en makuuchi, 52 basho consécutifs.
On pressentait que cela allait être compliqué pour Kisenosato, la banderole d’un yobidashi le confirme : l’ozeki est kyujo pour la dernière journée et sera donc kadoban en mars. Pas trop d’inquiétudes à avoir pour lui cela dit (s’il est remis de sa blessure, bien entendu), mais surtout des regrets. C’est le tout premier kyujo de l’ozeki qui avait disputé 955 combats de rang, une performance. En passant, un vieux guerrier de juryo, Kimurayama, tire également sa révérence, définitive celle-ci, tout comme un autre ancien sekitori, Kotokuni, tombé lui en makushita. Victoire à la Pyrrhus pour Okinoumi qui parvient à sortir en puissance et au terme d’un combat physique le lourd Toyohibiki, mais qui se blesse apparemment à la jambe dans l’action finale. Combat de dupes et de hochets du basho entre Chiyotairyu et Takekaze, chacun des deux hommes repoussant à tour de rôle l’adversaire à la tawara. Chiyotairyu a le malheur de manquer une fois la cible, permettant à Takekaze de se retirer pour un hikiotoshi qui n’arrange pas les affaires du vaincu.
Croyez-le ou non, Satoyama était envisagé pour un prix ce basho, s’il parvenait à décrocher son kachi-koshi au dernier jour, le gino-sho en l’occurrence. Il tombe sur un os toutefois, Takayasu en l’occurrence, décidé à revenir à des hauteurs plus compatibles avec son réel niveau, lui qui aura déçu dans un basho où l’on attendait un score à deux chiffres pour lui. Le combat entre les deux rikishi est long et intense, Takayasu faisant valoir son allonge, Satoyama sa capacité à plonger au cœur de la garde de son adversaire, sous ses épaules.au terme d’une lutte homérique Satoyama retourne l’axe de sa poussée et parvient à faire choir Takayasu en arrière, mais un mono-ii est convoqué et ce que l’on soupçonnait au vu du combat est confirmé : le verdict est retourné pour hansoku, geste interdit, Satoyama ayant nettement accroché l’oicho-mage de Takayasu. Dommage, un tel combat ne méritait pas une telle fin. Satoyama, qui pouvait décrocher son kachi-koshi et le gino, se retrouve sans prix et possiblement rétrogradé.
Victoire tranquille d’Ikioi qui surclasse Kyokutenho en puissance après avoir décroché un morozachi. Aoiyama est un peu trop laxiste dans sa défense aujourd’hui pour ne pas se mettre en étonnante difficultés face à un Kyokushuho pourtant promis à la juryo. Revers majuscule pour Aminishiki, totalement dépassé par la puissance de Fujiazuma et incapable d’esquisser le moindre geste de résistance. Gagamaru ne semble pas des plus motivés après avoir eu son kachi-koshi. Kaisei en profite pour décrocher un morozachi et son propre sésame. Succès tranquille de Takarafuji qui décroche une neuvième breloque contre Shotenro, totalement hors du coup tout le tournoi, qui donne ce qu’il a dans les secondes après l’atari mais montre rapidement d’inquiétantes limites physiques. La chute pourrait ne pas s’arrêter là. Combat de 7-7 entre Kitataiki et Tokushoryu, long et équilibré. Kitataiki semble devoir placer l’assaut décisif mais lâche le mawashi de Tokushoryu inexplicablement, laissant son adversaire repartir en avant, sans manquer la cible. Pas la meilleure conclusion de basho pour Masunoyama qui joue au senshuraku son kachi-koshi, et le perd au terme d’un combat accroché face à Tochinowaka (rassurant de voir un rikishi déjà kachi-koshi ne pas lâcher contre un 7-7) ; le poids lourd semble en plus s’être à nouveau blessé au genou. Dur. Dur combat entre Yoshikaze et Chiyootori, la victoire du pensionnaire de la Kokonoe lui permettant de rejoindre sa victime du jour à dix succès. Tous deux auront un basho compliqué en mars, sans doute.
En juryo, Chiyomaru ne laisse pas de place au suspense en se défaisant sans souci de Seiro. Bien lui en prend, son dernier adversaire, Terunofuji, l’emportant également. Le kettei-sen de jonidan voit le doublé réalisé par le revenant Kotoninsei, qui après le jonokuchi yusho en décembre, double en janvier en submergeant Asakoki. Tokkoriki, lui, revient aussi de blessure pour au final disposer du bon nouvel impétrant Yonamine qu’il bat dans un rare kettei-sen dans la plus basse des divisions. La makushita avait été remportée par Higoarashi, et la sandanme par Horikiri (sur yorikiri ?).
Pour les promotions-rétrogradations, il paraît clair avec la onzième victoire de Tochiozan que celui-ci, outre le fait d’entamer un ozeki-run, sera sekiwake au prochain basho malgré les réticences de la Kyokai à avoir trois titulaires à ce grade. Toyonoshima et Shohozan devraient compléter les rangs sanyaku, le casse-tête pour la constitution étant à venir pour les rangs joi-jin, où d’énormes promotions sont à prévoir, dont celle d’Endo.
Les kyujo de Koyoyuki et Homasho libèrent deux places en division reine, auxquels s’ajoutent les contre-performances de Shotenro, Tokitenku et Kyokushuho. Sont appelés à monter Terunofuji, Jokoryu, Azumaryu, Chiyomaru et sans doute Tenkaiho.
En juryo, la charrette concernera Sakigake, Takanoyama et Kimurayama (intai au final). Les promus sont tous d’anciens sekitori, en l’occurrence les deux revenants de (graves) blessures Amuru et Tosayutaka, accompagnés par Sagatsukasa.