Marcel Proust n’aurait pas renié l’expression, même si en l’occurrence, les deux yokozuna en question ne sont pas franchement à la recherche d’un quelconque temps perdu. A tout le moins sur le dohyo, où leurs combats respectifs n’ont duré que le temps strictement nécessaire à la conquête d’une nouvelle shiroboshi, histoire de préparer un combat final anthologique (c’est ce qu’on espère tous désormais que le suspense s’envole). La hanamichi (le chemin des fleurs) voit aujourd’hui aller et venir Harumafuji comme Hakuho sereins et pas franchement déboussolés par l’opposition qui leur est proposée. Harumafuji tout d’abord, particulièrement expéditif face à Toyonoshima qui ne se faisait pas beaucoup d’illusions face au yokozuna qui le bat trois fois sur quatre. Un tachiai bas et incisif du Mongol lui permet de bloquer le bras droit du nain tout en remontant sa position de son propre bras droit, ce qui lui permet de l’achever sur shitatenage.
Harumafuji tranquille…
Hakuho n’est pas beaucoup plus dérangé par Goeido, trop brouillon et incapable de gagner le duel du placement de bras, ce qui lui pose un souci de position et d’équilibre que le yokozuna exploite en hatakikomi pour retourner dare-dare à la shitaku-beya.
Dors, je le veux…
Les deux adversaires des yokozuna étaient à peu près tout ce qui restait comme opposition digne de ce nom, elle est désormais écartée quasi définitivement. Seul Chiyotairyu rejoint les deux battus en décrochant le kachi-koshi par la grâce d’un succès de prestige contre le vétéran Kyokutenho, balayé en puissance et par la faute d’une position très basse du jeunot.
Kachi-koshi et maintien en makuuchi pour Chiyotairyu.
Situation contrastée ce jour chez les ozeki. Si Kakuryu et Kotooshu sont sur une bonne dynamique, le Bulgare se rapprochant du kachi-koshi salvateur pour lui, Kisenosato et surtout Kotoshogiku sont dans l’embarras. Kotooshu décroche donc sa septième victoire aux dépens de son meilleur ennemi Kisenosato, contre qui il reprend une dynamique de succès. Yoghourt profite d’un tachiai peu incisif et sans manœuvres (pour une fois) de Kisenosato pour lui saisir le mawashi main droite et le repousser en force.
Kotooshu proche de la délivrance.
Kakuryu, lui, étourdit le buffle Takekaze d’une grosse baffe avant de laisser le restant de charge de celui-ci plonger vers le sol. C’est donc Kotoshogiku qui est la grosse surprise du jour, battu sur hatakikomi par l’étonnant Masunoyama, qu’on n’attendait pas à pareille fête. L’ozeki n’ayant pas assuré la prise de mawashi qui lui assure d’habitude un succès tranquille, il se voit surpris par le poids lourd qui l’attire brusquement au sol. Le visage de Masunoyama après le combat en dit long sur sa motivation et sa satisfaction. Avec encore les deux yokozuna à son programme, Kotoshogiku n’a lui plus trop de marge de manœuvre et devra être parfait dans le reste du programme s’il ne veut pas avoir à créer une sensation.
Ca se complique pour Kotoshogiku.
Pas de changements en tête de la juryo où les quatre lutteurs les mieux placés remportent tous leurs combats. Tochinowaka, sur un nuage, est repoussé par la puissance de Daikiho mais pivote pour exécuter son adversaire sur uwatenage. Ils ne sont qu’une vingtaine à avoir remporté depuis la guerre leurs dix premières confrontations en juryo, la quasi-intégralité ayant remporté le tournoi. Mais Sadanofuji ne l’entend sûrement pas de cette oreille. Empêtré avec Satoyama en position très basse et le mawashi de celui-ci plutôt lâche et donc pas facile à maniper en yotsu, le poids-lourd finit par relâcher son étreinte pour une victoire remportée sur deux poussées puissantes. Kyokushuho complète le trio, à deux victoires de la tête, décrochant le kachi-koshi en puissance à l’aide d’un bras sous la garde de Tamaasuka, et prouvant ainsi que sa blessure n’est plus qu’un lointain souvenir.
Tenkaiho est le bourreau d’Oiwato qui domine mais relâche un bras au moment de la poussée finale, ce dont le très lourd lutteur de l’Onoe-beya profite pour se désaxer et entraîner son adversaire au sol. Oshidashi simplissime pour Takarafuji qui effectue une offensive en tsuppari de qualité, puissant et coordonné. Kitaharima est tout proche de sortir Tokushoryu, mais trop désaxé au moment de pivoter à la tawara, il pose largement un pied dehors. Le fumidashi qui s’ensuit le frustre autant qu’il le met dans une situation très compliquée pour le maintien. Combat de chiffonniers entre Akiseyama et Kotoyuki, ce dernier se révélant plus appliqué et remportant la mise en passant un bras sous la garde de son adversaire. Henka et prise de bras pour le Tchèque Takanoyama qui annihile le sumo puissant de Masakaze sur tottari. Oshi simple mais puissant de Homarefuji qui surclasse Hochiyama, et se donne un peu d’air dans l’optique du maintien. Jolie victoire de Sagatsukasa qui concède une prise avant sur le mawashi mais pivote sur son axe en saisissant le bras de Tanzo pour un tottari fort joliment exécuté. Repoussé en deux temps trois mouvements (littéralement comme au figuré), Takamisakari, sous les vivats clairsemés de la maigre foule du début de juryo, voit le spectre de sa retraite prendre un peu plus de consistance.
Le Beaujolais nouveau est passé, mais ça sent de plus en plus le pâté pour Takamisakari…
Oshidashi tranquille pour Tamawashi qui poursuit sur plus d’un tour de dohyo Kimurayama dépassé par les poussées de son adversaire. Au terme d’un combat vif et plaisant entre Mongols, Takanoiwa fait parler sa puissance et sauve pour l’heure sa situation en condamnant Seiro à reporter ses espoirs de promotion. Chiyoo, lui, garde une faible chance en plongeant Nionoumi dans une situation très compliquée.