Page 2 sur 5 PremièrePremière 1234 ... DernièreDernière
Affiche les résultats de 11 à 20 sur 45

Sujet : Les gaijin dans le sumo : état des lieux et perspectives

  1. #11
    Senior Member
    Inscrit
    novembre 2002
    Lieu
    Le monde entier
    Messages
    2 280

    Pas vraiment

    En fait, rares sont les rikishi Japonais ayant derrière eux une longue pratique du jûdô, seule forme de "lutte" locale se rapprochant du sumô. Je n'en vois pas d'autre.

  2. #12
    C'est juste. Je pense qu'une bonne partie des lutteurs japonais ont fait du Sumo, point.

    Et le problème du Sumo, c'est son histoire. Le Sumo n'est pas à proprement parler un art martial, ce n'est pas une discipline sophistiquée comme le sont la plupart des arts martiaux japonais, c'est une discipline populaire, simple.

    Les arts martiaux ont évolué dans la sophistication soit par obligation (par exemple, les okinawaiens envahis devant résister à l'envahisseur et par conséquent extraire les techniques les plus efficaces d'un ensemble de disciplines bien plus vastes), soit par souci de préservation de la tradition guerrière (par exemple, les samourai n'ayant plus rien d'autre à faire de leur temps, le Japon unifié, que bosser leurs bases pour les préserver).

    Au contraire, le Sumo a toujours été une discipline simple, populaire, basée sur la répétition à l'infini d'exercices basiques et d'interactions, l'imitation et le simple renforcement musculaire et cardiaque, basé sur un ensemble de techniques restreint qu'on restreint encore plus selon le physique du lutteur. Il n'y a ainsi que les meilleurs, les plus pugnaces qui parviennent à s'extraire du lot, à force, mais ça peut prendre vraiment du temps. On ne leur explique rien.

    Beaucoup de disciplines de lutte, de combat, et en particulier la lutte mongole sont plus riches, plus variées, plus sophistiquées. Je pense que ce facteur là joue aussi beaucoup dans la différence qu'on constate entre un japonais s'étant formé au Sumo uniquement, et des lutteurs ayant eu une formation plus riche. Du jour où certains lutteurs japonais se sont mis à rationaliser leur entrainement, comme Kirishima, ils se sont d'un coup réellement détaché en avant du peloton. Je pense qu'on a un phénomène identique à l'heure actuelle, et je pense que tant que la formation des lutteurs au sein des heyas n'évoluera pas vers une plus grande sophistication, les japonais resteront en retard.

    Je pense aussi à l'instar de Toon que la raison essentielle de la prédominance des étrangers dans le Sumo vient du fait qu'il n'y a qu'un étranger par heya, et que ceux qui sont choisis sont donc la crème de la crème, les meilleurs potentiels ou ceux qui ont déjà fait leur preuves dans un autre système, ceci à un niveau national voire continental. Mécaniquement, ils sont donc statistiquement bien plus forts qu'une recrue japonaise moyenne.

    Enfin quant à la nationalité, je pense qu'il ne faut pas oublier que le Sumo c'est le Shinto, et que le Shinto est une religion nationale, basée sur le mythe fondateur du Japon. La question de la nationalité, si elle peut ne pas être évidente pour nous occidentaux, me parait essentielle dans les yeux d'un japonais.

    Désolé pour le style un peu télégraphique, j'ai peu de temps. N'hésitez pas à me demander de préciser telle ou telle pensée, s'il y a lieu, je répondrai un peu plus tard.

    Satori

  3. #13
    Senior Member
    Inscrit
    novembre 2002
    Lieu
    Le monde entier
    Messages
    2 280

    Absolument

    Analyses pertinentes, particulièrement celle évoquant la prédominance des étrangers. Potentiels plus facilement détectés et candidats poussés arrivant logiquement vers les hautes sphères.

  4. #14
    Senior Member Avatar de Zarak
    Inscrit
    mai 2009
    Lieu
    Belgique
    Messages
    115
    Mais est-ce que la force des gaijins ne viendrait pas plutôt d'une façon différente de s'entraîner? Quand on voit le système japonais, l'élève regarde ses aînés, puis il essaie de mettre en pratique... Le Maître trône sans rien apprendre personnellement à ses élèves la plupart du temps... C'est peut-être une bonne technique pour des Japonais, mais elle ne satisfait pas les gaijins. Nous, nous attendons de nos maîtres qu'ils s'impliquent personnellement dans notre parcours, nous avons des sparing-partners personnels, nous avons des entraîneurs qui ne s'occupent que de nous... Nombre d'étrangers ont leur propres entraîneurs quand ils ne sont pas à la heya... Dans ces conditions, comment s'étonner aussi qu'ils progressent plus vite que leurs condisciples japonais?

  5. #15
    Senior Member Avatar de Asafan
    Inscrit
    août 2003
    Lieu
    Lausanne CH
    Messages
    3 369
    Faudrait-il en conclure que si les Japonais veulent regagner les rangs les plus prestigieux du sumo, ils doivent soit en interdire l'accès à tous les étrangers, ce qui ne me choquerait pas du tout, je m'empresse de le dire, car c'est tout de même LEUR lutte traditionnelle, mais ce qui serait tout de même un aveu d'impuissance, soit élever le niveau de leurs critères de sélection et n'accepter que les jeunes Japonais qui auront un background en judo ou dans une autre forme de lutte ?

    Sinon, je ne vois pas ce que la lutte mongole a de plus sophistiqué que le sumo. Faudra que tu m'expliques, Sat'.

    Je rappelle également que personne ne voulait de Hakuho. Si Kyokushuzan ne s'était pas soûlé avec son oyakata, la crevette Hakuho ne serait jamais entrée dans ce monde-là. Donc, la crème de la crème des gaijin, ça ne le concernait pas vraiment. A moins que l'on considère que l'hérédité est prédominante. Si c'était le cas, on aurait eu tous les frères d'Asashoryu dans le sumo

  6. #16
    Senior Member Avatar de gotonin
    Inscrit
    mars 2007
    Lieu
    Chambéry / Osaka
    Messages
    548
    Tiens en parlant de ça, quelqu'un à une photo d'Hakuho jeune (d'avant)?

  7. #17
    Citation Envoyé par Asafan
    Faudrait-il en conclure que si les Japonais veulent regagner les rangs les plus prestigieux du sumo, ils doivent soit en interdire l'accès à tous les étrangers, ce qui ne me choquerait pas du tout, je m'empresse de le dire, car c'est tout de même LEUR lutte traditionnelle, mais ce qui serait tout de même un aveu d'impuissance, soit élever le niveau de leurs critères de sélection et n'accepter que les jeunes Japonais qui auront un background en judo ou dans une autre forme de lutte ?
    Je ne vois pas bien où tu prends ce raccourci. Mon propos en tous cas est de dire que les heya doivent modifier, adapter et enrichir leur entrainement, comme certains anciens avaient commencé à le faire. C'est mon point de vue et il est de plus en plus ferme.

    J'en ai de plus en plus la conviction à travers ma pratique, mon parcours dans les arts martiaux et les autres formes de pratiques que j'observe autour de moi, en Sumo ou ailleurs. Par exemple, je connais une méthode rationalisée d'apprentissage des bases de la stabilité, des positions et des déplacements. J'ai pratiqué le Karate mais notre professeur a été chercher cette méthode dans le Tai Chi. Je trouve extraordinaire de ne pas retrouver cette méthode comme base de toute pratique du Sumo. On peut gagner des années et d'énormes avantages rien qu'en apprenant ces bases. Mais je ne le vois pas enseigné. Personnellement je trouve ça bizarre, ça devrait être déjà fait.

    En Sumo dans les heya on apprend à la dure, par la répétition, mais de manière un peu simple. "Regarde, essaie, endure et sors toi les doigts". Les élèves doivent pratiquement tout réinventer à chaque fois. Je considère que cette méthode a ses limites, surtout si tu n'as pas 20 ans pour tout apprendre et devenir bon. C'est sûr que si tu traverses ce pare feu et que tu gagnes, tu es un type exceptionnel... mais que de déchets et de perte de temps.

    Je pense que les japonais auraient beaucoup à gagner à s'écarter un peu de leur entrainement traditionnel pour regarder et prendre ailleurs. Un bon nombre de disciplines y ont gagné, surtout par le passé. Kirishima a montré la voie, d'une certaine manière.

    Je pense de toute manière que ça se fera, tôt ou tard, de manière mécanique : à force de prendre des baffes, ou parce qu'on est moins fort que les autres, on réfléchit et on se demande comment reconquérir un avantage. Je pense que tôt ou tard un prof de heya fera ce constat et se demandera comment améliorer le truc. Ca n'est qu'une question de temps.

    Quant à interdire l'accès aux étrangers, je pense que je ne suis pas visé par ce commentaire. Je n'ai jamais exprimé une telle idée, et je trouverais même ça franchement dommage. A mon avis, les japonais et le Sumo ont tout intérêt à se mettre un peu en danger, justement pour éviter la sclérose...

    Citation Envoyé par Asafan
    Sinon, je ne vois pas ce que la lutte mongole a de plus sophistiqué que le sumo. Faudra que tu m'expliques, Sat'.
    Encore une fois, c'est mécanique. Les conditions de combat et de victoire de la lutte mongole font qu'il y a beaucoup plus de latitude quant aux techniques utilisées, parce qu'il est beaucoup moins simple de l'emporter. Il n'y a pas de limite ni de temps, ni d'espace, il s'agit grosso modo d'envoyer au sol l'adversaire, l'obliger à un appui significatif (coude, genou, dos, ...).

    Un lutteur hyper lourd n'aura donc a priori que peu d'avantage, voire plutôt un désavantage parce qu'il devra lutter contre sa propre masse du point de vue de la résistance.

    Vu qu'il n'y a aucune limite de temps et d'espace, la plage tactique, les qualités d'improvisation et la technicité deviennent essentielles. On ne retrouve ces nécessités en Sumo que chez les lutteurs les plus légers. En lutte mongole, c'est un prérequis obligatoire.

    Donc pour moi les lutteurs mongols ont beaucoup plus d'expérience, en moyenne, dans la tactique, l'improvisation, la mécanique corporelle et une bien meilleure technicité. Et ils savent avant tout rester debout quoi qu'il arrive. Ce sont des avantages essentiels en Sumo.

    C'est ça qu'on a retrouvé, brut de fonderie, chez Asashoryu et ce qui, d'après moi, l'a propulsé au sommet. Les japonais ne savaient rien faire face à ce lutteur hyper technique et toujours en train de transformer le combat pour trouver la faille, improviser. Ils se faisaient dévorer tout cru, engoncés dans leurs routines relativement limitées. Je parle surtout du Asashoryu pré Yokozuna, après ça on lui a demandé (reproché?) et il a appris à devenir un lutteur de Sumo "classique", bien (plus) sage. Et moins sympa à regarder, enfin pour moi du moins.

    Voilà pour la "sophistication" de la lutte mongole vis à vis du Sumo.

    Tout ceci dit, je me sens obligé de dire que malgré ces arguments en faveur de la lutte mongole, je préfère toujours regarder du Sumo que de la lutte mongole, même si j'ai pour cette dernière un véritable respect. J'aime cette limite d'espace. Elle permet à des morphologies et des styles très différents de coexister à des niveaux d'efficacité équivalents, et renforce la tension, l'obligation de perfection. Tu ne peux pas te permettre le moindre instant de faiblesse, sinon tu es déjà dehors, ou par terre, même si tu es le meilleur du monde.

    C'est cet état de corde raide permanente que j'aime le plus dans le Sumo. C'est un tout petit peu moins vrai en lutte mongole, je trouve, où l'option de se dégager d'un mauvais pas en reculant existe pratiquement toujours.

    Satori

  8. #18
    Senior Member Avatar de Zarak
    Inscrit
    mai 2009
    Lieu
    Belgique
    Messages
    115
    Finalement, c'est peut-être ça le problème des Japonais, Asa : le manque de discernement... Et sans aller jusqu'à n'accepter que des jeunes ayant déjà pratiqué une forme de lutte, ils feraient quand même bien de mieux sélectionner leurs disciples. C'est quand même assez navrant de voir des jeunes qui se lancent dans le sumo et s'arrête après un ou deux bashos... Ce n'est pas en si peu de temps que l'on peut présumer si l'on possède ou non les qualités voulues, on aurait plutôt envie de dire que ceux qui se laissent décourager aussi vite n'avaient vraiment pas beaucoup de motivation... Je me trompe?

  9. #19
    Senior Member Avatar de asakusa
    Inscrit
    septembre 2007
    Lieu
    Paris
    Messages
    488
    Merci à toi Satori pour ces développements diablement intéressants.
    Je suis moi aussi frappé par la rusticité des conditions d'entraînement dans les heyas (une seule aire de combat assez étroite, quelques haltères antédiluviennes, pas de suivi médical rapproché...) et surtout par l'absence quasi-totale d'évolution en la matière depuis des décennies, alors que tous les sports sont passés l'un après l'autre dans l'ère de la rationalisation.
    L'oyakata qui aura la lucidité et le courage de briser la routine et d'imposer des méthodes "modernes" produira de sekitori à la pelle (ou peu s'en faut...)

  10. #20
    Citation Envoyé par asakusa
    Merci à toi Satori pour ces développements diablement intéressants.
    Je suis moi aussi frappé par la rusticité des conditions d'entraînement dans les heyas (une seule aire de combat assez étroite, quelques haltères antédiluviennes, pas de suivi médical rapproché...) et surtout par l'absence quasi-totale d'évolution en la matière depuis des décennies, alors que tous les sports sont passés l'un après l'autre dans l'ère de la rationalisation.
    L'oyakata qui aura la lucidité et le courage de briser la routine et d'imposer des méthodes "modernes" produira de sekitori à la pelle (ou peu s'en faut...)
    C'est gentil. Mais je n'irai pas non plus forcément jusque là. Je suis convaincu de l'avantage que procurerait une certaine dose de rationalisation des entrainements, l'ouverture à certaines techniques, certaines méthodes, mais ça ne suffit pas. Comme ça a déjà été souligné il faut aussi deux autres choses au moins pour fabriquer des champions : de la matière (des talents, physique et intellect réunis) et la volonté farouche de se faire mal de la part des jeunes. L'expression "Mort de faim" convient parfaitement.

    Or dans la société moderne et les pays disons "confortables", la tendance est plus à la playstation, au téléphone portable et aux plats surgelés qu'aux 20 bornes par jour pour rejoindre l'école, disons. Le goût de l'effort a passé et aujourd'hui, on t'apprend que même un blaireau a une chance de devenir une star en poussant des petits cris distordus dans un micro. Alors pourquoi se faire ch..., le message est que ça te tombe tout cuit. Comparativement, une vie cloisonnée à prendre des baffes parait difficilement attractive.

    Bref, même si un professeur se décide à tout casser, comprend ce qu'il faut faire et l'applique, je doute qu'il se mette brutalement a fabriquer à la chaine des bêtes de combats. Il lui faudra pas mal de chance aussi et ça sera pas mal s'il "produit" quelques lutteurs intéressants. A partir de là on verra peut être un effet d'entrainement. Peut être.

    La résistance est lourde dans le Sumo. Ils ont même fini par trouver une excuse pour virer l'un des meilleurs combattants qu'ils ont jamais eu simplement parce qu'il n'entrait pas bien dans le cadre de leur photo de famille, alors... Les polynésiens ont été tout aussi viré de leur sélections, pour des raisons identiques. C'est tellement stupide, et un tel gâchis... M'enfin remplacer les polynésiens par des mongols, je ne suis pas certain qu'ils aient percuté qu'ils n'y ont pas forcément gagné au change. Enfin bref. De mon coté, j'espère donc un changement mais je n'attends aucun miracle.

    Satori

sujet d'information

Utilisateur(s) parcourant ce sujet

il y a actuellement 1 utilisateur(s) parcourant ce sujet. (0 membres et 1 visiteurs)

Liens sociaux

Règles des messages

  • Vous ne pouvez pas créer de sujets
  • Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
  • Vous ne pouvez pas importer de fichiers joints
  • Vous ne pouvez pas modifier vos messages
  •  
  • Les BB codes sont Activés
  • Les Smileys sont Activés
  • Le BB code [IMG] est Activé
  • Le code [VIDEO] est Activé
  • Le code HTML est Désactivé