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Sujet : Mémoire d'un lutteur de Sumô

  1. #11
    Senior Member Avatar de Sakana
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    Citation Envoyé par Vincentohana
    les jeunes préfèrent pratiquer d'autres sports nouveaux, comme le base-ball et le foot qui sont beaucoup moins éprouvant physiquement.
    tout sport, à haut niveau requiert de l'entraînement, de l'investissement, donc je ne pense pas que ça soit la raison principale... je pense, perso, que ça tient plus au fait que les jeunes Japonais ne voient pas ça comme une marque de "modernisme" ou de "mode"

  2. #12
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    Sports traditionnels.

    Les jeunes Japonais jouent au baseball depuis la fin du 19ème siècle, époque à laquelle les sports occidentaux sont devenus "à la mode". L'Angleterre servait alors de modèle.
    Quant au football, sa pratique ne date de la Coupe du Monde en Asie car on y joue depuis le début du 20ème siècle dans les écoles de l'archipel.
    Les jeunes Nippons sont certes moins attirés par le sumo professionnel mais il reste pratiqué dans les écoles. Et si les vocations pour entrer dans le monde du sumo sont plus rares depuis quelques décennies, se rendre dans un centre de recrutement prouve que les candidats restent nombreux malgré tout.
    Ceci est assez évident quand on connait le Japon profond mais effectivement moins visible de l'extérieur.

  3. #13
    Citation Envoyé par furanohana
    D'autres, qui ont pu assister en vrai à des entraînements, pourront certainement en dire plus que moi (Joe ?).
    J'ai effectivement assisté à plusieurs entrainements (Musahigawa beya, Takasago beya et Kokonoe beya), et de manière générale on réalise toujours à quel point le sumo est une société hierarchisée (je vous renvoie à l'interview de Takanohana dans le MDS 3 pour mieux comprendre.)

    Ce sont les moins gradés qui ont à se lever plus tot pour s'entrainer avant que les sekitori arrivent. Dans leur propre interet, il vaut mieux qu'ils soient tous chaud, ne serait-ce que pour soutenir l'échauffement des sekitori. Il y a un adage qui dit qu'il y a autant de différence entre les makushita et les juryo qu'il y en a entre l'enfer et le paradis. Eh, ben, c'est vrai, ça fait froid dans le dos de voir comment les sekitori vétu de leur mawashi de soie blanche sont au-dessus des apprentis.

    Quelques fois, il arrive qu'un apprenti bat un sekitori qui était ailleurs. Le combat suivant l'apprenti se fait punir méchamment. Je me souviens par exemple qu'Asasekiryu s'était fait battre par un makushita. Asashoryu, qui dirigeait l'entrainement, lui a donné l'ordre d'y aller. Alors le combat d'après, Asasekiryu a pris l'apprenti et l'a applati comme une crepe en faisant claquer son dos sur le dohyo avec un bruit assourdissant. En fait, l'idée est de montrer au jeune que le chemin est encore bien long (école de la modestie) et de l'éprouver physiquement et mentalement. Dans un cas pareil, l'apprenti, malgré la douleur, doit se relever dans les plus brefs délais pour se représenter devant lui et le remercier (repect de la hierarchie). L'important n'est pas de ne pas tomber, mais de se relever à chaque que l'on est à terre. Surmonter l'adversité, ceux qui en sont incapables n'y arriveront pas. Ainsi, plus on pense du bien de vous, plus les sekitori vous en font baver. Evidemment, ça peut aller très loin...


    Chiyohakuho

    M'enfin, la seule fois où j'ai été choqué, c'est lorsque que j'ai vu l'espoir mukushita Chiyohakuho maltraiter le jeune Horie avec l'aide de Chiyonohana, à la Kokonoe beya. A dire vrai, par respect, je n'ai pas pris de photo de la scène, mais le pauvre s'est fait tirer par les cheveux sur tout le dohyo, on lui a fait bouffer de la terre, etc..., sans oublier les punitions qu'il a subi sur le dohyo. Il y a aussi une énorme différence de niveau entre les makushita et les jonidan. Mais bon, pour comprendre la scène, il faut être formaté à la culture japonaise (le groupe avant l'individu, la souffrance avant les résultats, etc..), alors l'étranger que je suis a été un peu stupéfait. Cela dit, Horie, classé Jonidan 45 Est, vient de réaliser le plus beau tournoi de sa carrière avec un brillant 6-1, glanant sans doute une promotion en sandanme. Peut-etre que ses mauvais traitements lui ont donné la rage nécessaire pour devenir plus fort et donner une raclée à Chiyohakuho en retour. Aurait-il accompli cela s'il n'avait pas mangé chaud auparavant ?


    Horie

    On ne pourra jamais répondre avec certitude à ce genre de question, mais la motivation, la maltraitance, le désir de gagner des privilèges en s'élevant dans le banzuke sont une partie indéniable du sumo professionnel. Arriver au sommet nécessite beaucoup de sacrifice et de souffrance, et c'est à ce titre que le livre de Kirishima est une merveille qu'il convient de relire à plusieurs pour en saisir les nuances.

    Fin de la longue tirade,
    Joe le cogneur aka Chienoshima
    Joe le cogneur aka Chienoshima

  4. #14
    Merci pour cette longue réponse, Joe ! C'est exactement ce que je pensais, mais que je n'osais expliquer (celui qui n'a jamais vu en vrai, ni jamais vécu au Japon...).
    Furanohana
    "Le sumo c'est bôôôôôôôôô"

  5. #15
    Senior Member Avatar de Azumashida
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    Citation Envoyé par Joe_le_cogneur
    M'enfin, la seule fois où j'ai été choqué, c'est lorsque que j'ai vu l'espoir mukushita Chiyohakuho maltraiter le jeune Horie avec l'aide de Chiyonohana, à la Kokonoe beya. A dire vrai, par respect, je n'ai pas pris de photo de la scène, mais le pauvre s'est fait tirer par les cheveux sur tout le dohyo, on lui a fait bouffer de la terre, etc..., sans oublier les punitions qu'il a subi sur le dohyo. Il y a aussi une énorme différence de niveau entre les makushita et les jonidan. Mais bon, pour comprendre la scène, il faut être formaté à la culture japonaise (le groupe avant l'individu, la souffrance avant les résultats, etc..), alors l'étranger que je suis a été un peu stupéfait. Cela dit, Horie, classé Jonidan 45 Est, vient de réaliser le plus beau tournoi de sa carrière avec un brillant 6-1, glanant sans doute une promotion en sandanme. Peut-etre que ses mauvais traitements lui ont donné la rage nécessaire pour devenir plus fort et donner une raclée à Chiyohakuho en retour. Aurait-il accompli cela s'il n'avait pas mangé chaud auparavant ?
    Voilà qui confirme la réputation de la Kokonoe beya, dont on dit qu'elle est la plus dure pour les ptits jeunes mal classés. Il n'y a pas si longtemps (je dirais deux-trois ans), un jeune lutteur de la heya a porté plainte contre certains Rikishi, dont en particulier Chiyotenzan, si je ne me trompe... Quelqu'un a-t-il des infos plus précises sur ce qui avait alors été un mini-scandale au sein de la Kyokai?
    En tout cas, merci, Joe, pour nous avoir fait partager cette expérience de l'intérieur!

  6. #16
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    Comme Joe, les entrainements de sumo auxquels j'ai assisté était particulièrement durs pour les "jeunes".

  7. #17
    Une chose est sure c'est qu'au Japon, les chatiments corporels se donnent très facilement quelque soit la discipline. Ce doit être un aspect culturel, une manière de penser et d'agir "à la spartiate". Du coup, pour le sumo, qui est un sport de combat, cet aspect ne doit pas être plus choquant que ça pour un japonais (je dis ça, mais je n'ai pas fait d'études sociologiques n'est-ce pas... c'est juste mon opinion).

    Par contre s'il est vrai que certains s'en détourne par pudeur, je trouve ça regrettable. A croire que la pudibonderie gagne le monde entier pfff...
    Père Boulon

    Il n'y a de richesse que d'Hommes.

  8. #18
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    chose amusante, j'ai presque retrouvé cet aspect (dureté de l'entraînement, brimades des anciens...) en lisant hier un passage du livre de Yoshikawa La Pierre et le Sabre où il est décrit brièvement un entraînement de samurai...

    ça semble effectivement appartenir aux 'habitudes'

  9. #19
    titan
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    UN petit mot de remerciement.

    Jai lancé sur ce site une toute petite question sur le sumo.Jai été agréablement surpris de la réponse. Je tiens à remercier ( FUR ANOHANA.) pour ses explications très précises. Bravo ,merci encore. Un homme qui vient du froid... du québec.

  10. #20
    Senior Member Avatar de Hoshifransu
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    Un fan du sumo qui nous écrit du Québec ? C'est génial ! Depuis le temps que j'attendais ça ! J'adore le Québec ! Votre accent, votre culture, votre pays est génial ! Je vous adore !!! Il faut revenir vite dans le forum !

    En ce qui concerne le livre, il est remarquable, et d'autant plus que l'auteur a eu l'intelligence de choisir le lutteur le plus représentatif en matière de non-renoncement, à savoir Kirishima. Son parcours dans la hiérarchie est hallucinant et à aucun moment, aucun spécialiste n'aurait misé un kopek sur lui en tant que futur ozeki. Ce livre montre son acharnement, la dureté de ses entraînements musculaires, sa persévérance dans la prise de poids malgré ses réticences dans l'absorption de la nourriture, avec en toile de fonds la pauvreté d'alors, dans les campagnes japonaises et l'histoire typique du jeune qui tente d'échapper à sa condition en triomphant dans le monde difficile du sumo.
    Ce qui, depuis la formidable ascension économique du Japon des années 80, n'est désormais qu'une exception. En effet, comment un jeune peut-il encore choisir une telle voie, dans un pays aux nombreuses autres possibilités ?
    Ainsi, pour en revenir à la dureté des entraînements de sumo, concernant les humiliations corporelles, je suis résolument contre, et je trouve que l'efficacité de celles-ci n'est pas prouvé, loin de là. Ca me rappelle les stages commando particulièrement poussés qu'avaient subi les joueurs de rugby des Springboks (Afrique du Sud) avant la dernière coupe du monde, et celà n'a pas empêché un cuisant échec, malgré un potentiel bien meilleur que leurs résultats, in fine.
    Si les japonais veulent que les jeunes affluent à nouveau en direction du sumo, il faut inévitablement changer ces habitudes-là. Je n'ai pas l'habitudes de me prononcer dans le sens de la réforme, mais celle-ci me semble absolument essentielle, car sinon, le sumo ne pourra attirer que des lutteurs des pays, dirais-je, moins favorisés et où la vie est plus rude. Exemple : Mongolie, Bulgarie, Kazakhstan, Russie, Estonie, Tchéquie, Chine, etc..
    A contrario, le sumo anglais lancé par Syd Hoare il y a quelques années, a laissé tomber, ne supportant pas la cruelle féodalité dans les écuries de sumo, et malgré ses bons résultats (kachikoshi à chaque fois).
    Le système de classification est un long cheminement avant d'arriver aux places de rikishi salariés (sekitori) et les blessures entraînent des chûtes vertigineuses, et ce système est forcément à repenser également, si l'on veut susciter les vocations. Il est bien plus facile pour un jeune japonais qui a un potentiel physique, de démarrer dans un autre sport et d'y gagner sa vie rapidement et plus sûrement.

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