Hatsu basho 2014 – 8ème journée (Nakabi)

Cavalier seul

Petite phrase liminaire pour cette chronique dominicale, que je souhaite être un hommage à Naya Koki, décédé il y a tout juste un an. Une légende qui manque à tous les passionnés.
A regarder les scores de ce Hatsu 2014 au sortir du nakabi, on serait tenté de penser que cavalier seul il n’est pas. Car on a encore un lutteur, et pas des moindres puisqu’il s’agit d’un ozeki, qui est au contact du yokozuna, à un seul et petit succès. Mais qui peut penser que Kakuryu, l’ozeki en question, pourrait être de taille à rivaliser avec l’Über-rikishi ? Kakuryu n’a que par trois fois, depuis son accession au grade, atteint ou dépassé les dix succès en basho, un 11-4 et deux 10-5. Ajouté au fait qu’il n’a battu que deux fois – des accidents industriels, on pourrait dire – son compatriote, cela ne laisse que peu de place à la rêverie. Autant dire qu’il va falloir trouver sans doute d’autres sujets de discussion pour animer la fin de basho, comme les luttes de repromotion ou contre la rétrogradation des siamois de la Sadogatake-beya, le retour en grâce mental d’un Kisenosato toujours aussi friable sous pression, un éventuel nouveau début d’ozeki-run pour Goeido ou les perfs des « up-and-comers » tels Endo et Osunaarashi. On se console comme on peut.
En attendant, force est de constater que le scénario déjà vécu d’un basho couru dès le dernier vendredi se met en place. Serein et tranquille, Hakuho ne s’en laisse pas compter face au compact et rugueux Shohozan, qui semble prendre le dessus sur le yokozuna dans les deux premières secondes du combat. Mais tout en reculant, Hakuho atteint ce qu’il cherchait, à savoir une solide prise en kotenage, qui vaut au jeune impudent une auto-sortie pour échapper à l’ablation de son coude. Hakuho est kachi-koshi au nakabi, ce qu’il réalise trois basho sur quatre depuis qu’il est yokozuna.

Victoire de raccroc pour Kakuryu, mais victoire quand même, l’ozeki continuant de s’accrocher tel le morpion aux basques de son compatriote yokozuna. Il défait Ikioi après un festival de baffes conclu par une offensive du maegashira que l’ozeki contre in extremis par la grâce d’un sumo de recul « à l’européenne », diront certains. Mais pour Kakuryu, la question n’est pas le flacon, mais une possible ivresse…

Derrière les deux Mongols, on retrouve cinq rikishi à six succès. Outre Shohozan, c’est Endo qui rejoint ce paquet avec un revers. Le combat phare du bas de la division oppose en effet Osunaarashi à Endo, le yokozuna universitaire montrant une précipitation coupable dont profite l’Egyptien pour, après une lutte de tsuppari, appuyer sur la nuque du Nippon pour l’amener à terre.

Gagamaru ne s’en laisse pas conter par Satoyama qui la joue feu follet, sa seule chance face au double quintal, qui riposte sur un gros kotenage qui manque de briser le coude de son adversaire. Tokushoryu avait un plan en tête, et c’est au final sa deuxième prise de bras qui lui permet de venir à bout de Tochinowaka un peu naïf sur ce coup.

Ça sent la peur pour Kotoshogiku , qui plante une sorte de henka sur Aoiyama, bien aidé il faut cependant admettre par un Bulgare présomptueux et chargeant quasi les yeux fermés.

Kotooshu est dans une situation tout aussi critique, car si l’on suppute que ses chances face à Hakuho sont réduites, que l’on ajoute Kakuryu toujours en course pour son premier yusho, il n’a quasi plus de joker à sa disposition. Autant dire que sa lutte face au minipouss Takekaze revêt pour lui une certaine importance. Dans une position incertaine, le Bulgare montre du sérieux et de la constance dans sa poussée et surtout ses appuis, ce qui lui permet au final de s’écrouler, mais sur le corps de son adversaire. Sursis (encore) en cours pour l’ex-ozeki.

Kisenosato avait pas mal réduit les espoirs de promotion en concédant un revers dès le shonichi. Avec une nette défaite aux mains de Tochiozan, dominateur dans l’acquisition et l’exploitation du mawashi, c’en est clairement et définitivement terminé. Il faudra tout recommencer pour lui (mais y avait-il eu seulement un véritable début ?).

Goeido n’a pas encore abdiqué ses prétentions à un ozeki-run, même s’il va lui falloir cravacher sévère. Cela commence aujourd’hui avec ce succès probant sur Okinoumi, dominé du début à la fin pour un yorikiri tranchant. Le sekiwake peut être un danger pour tous sur cette fin de basho à venir.

Tyonoshima confirme ses aspirations à un retour en sanyaku en disposant de Toyohibiki. Le petit recule sous l’impact mais travaille dans le même temps qu’il contient les assauts à trouver l’ouverture large sous les aisselles. Revenu au centre, il n’a plus alors qu’à passer les watts sur Toyohibiki hors de souffle. Succès express pour Aminishiki qui profite de la charge trop bourrine de Chiyotairyu pour le choir sur un hatakikomi opportuniste. Belle manœuvre de Kitataiki qui enroule sa jambe autour des appuis du vétéran Kyokutenho et le crochète en dépit de la tentative de pivot de ce dernier. Sotogake. Combat maîtrisé pour Kaisei qui place ses bras sous les aisselles de Shotenro, le différentiel de puissance faisant le reste. Peu en verve et clairement en méforme à une place où il devrait faire des étincelles, Takayasu ne pèse pas lourd face à Tamawashi plus placé dans ses frappes et qui sort sans coup férir son jeune adversaire. Pas payé de ses efforts, Takarafuji ne peut conclure ses puissantes poussées et se fait contrer par Chiyootori qui ne manque pas, lui, l’occasion. Kagamio place une henka suivie d’une prise de bras pour conclure en okuridashi sur un Fujiazuma mystifié. Joli combat entre les poids lourds Masunoyama et Sadanofuji, Masunoyama l’emportant sur yorikiri au terme d’un torikumi enlevé. Yoshikaze profite intelligemment d’un placement très bas face au grand gabarit de Kyokushuho pour contrer la tentative d’uwatenage du Mongol en shitatenage, qui contraint Kyokushuho à poser sa main à terre. Tokitenku se révèle bien trop mou pour Takanoiwa qui, une fois une grosse prise du gauche assurée, pivote pour armer un uwatenage dévastateur.

Situation enfin différenciée entre les deux premières divisions, puisqu’en juryo Chiyomaru cède pour la première fois du tournoi, dominé par Tochihiryu. Azumaryu et Sadanoumi ne loupent pas l’opportunité de se hisser en tête. En makushita, Amuru continue un parcours sans faute qui lui permet d’être le premier makushita-joi à décrocher le kachi-koshi, et prend une option pour un retour ô combien mérité et méritoire en juryo. Le premier gaijin tsukedashi, Ichinojo, cède face à Yamatofuji. Amuru est favori pour le yusho. En sandanme, Keitenkai, en perdant, ouvre la voie à un outsider bien difficile à déterminer. Ikeru connaît un coup d’arrêt. Situation similaire en jonidan, tandis qu’en jonokuchi, le meilleur des shindeshi, Yonamine, reste en course.