Kyushu basho 2013 –11ème journée (Juichinichi-me)

Hakuho - Harumafuji l'autre Zlatan - CR7

Toute comparaison vaut ce qu’elle vaut, bien entendu. Pour cette chronique du jour, votre serviteur était en mal de titre accrocheur, et est donc allé puiser dans le large vivier du football, qui n’est pas fait que de France-Ukraine (superbe match, soit dit en passant), pour trouver sa pitance. Alors certes, Messi serait plus adapté pour Hakuho (pour le talent, pas le gabarit…), Harumafuji collant quant à lui bien au talent brut et à la relative inconstance des deux butteurs objet du présent titre. Mais l’affiche d’hier était un Portugal-Suède qui a vu la victoire de CR7 sur Zlatan par un triplé contre un doublé, donc… Bref, tout ceci pour dire (une fois encore) que les deux yokozuna mongols sont plus que jamais sur une autre planète, et qu’aucun, pas même Kisenosato, de leurs poursuivants relégués déjà à deux respectables unités, ne paraissent en mesure de troubler leur route tranquille vers un alléchant affrontement à 14-0 quand le senshuraku sera là. On en salive déjà.
Sûr de lui, Harumafuji repousse par deux fois Goeido puissamment. Le sekiwake n’est pas intimidé mais il est trop court physiquement, et le yokozuna, roublard, place une ouverture quand l’aspirant ozeki, dont la course risque d’être compliquée tant le pallier paraît difficile à franchir, charge à nouveau. Harumafuji est plus que jamais face à Hakuho.


Le dai-yokozuna, lui, se plaît dans ce basho à mener pas mal de combat sans prise de mawashi. A croire d’ailleurs que cela pourrait bien cacher une blessure ou un ennui quelconque, ne fut-ce la puissance et l’habileté avec laquelle il mène les débats sur un terrain qui n’est pas son univers habituel. Ou, autre possibilité plus que possible, étant déjà conscient que Harumafuji sera le seul obstacle sur sa route et que son compatriote mènera la lutte sur le terrain des baffes, n’ayant que peu de chances au mawashi, Hakuho est d’ores et déjà en phase d’entraînement pour soutenir le choc que celui-ci va tenter de lui imposer. Tochiozan est proprement expulsé sans avoir eu un instant le début d’une opportunité. Les deux yokozuna sont sur une autre planète dans le Japon septentrional. En passant, Hakuho atteint pour la troisième fois (après 2009 et 2010) la barre symbolique des 80 succès en année calendaire, exploit inédit puisque seuls Takanohana (1994 et 1995) et Kitanoumi (1977 et 1978 ) avaient connu une telle réussite à deux reprises (les seuls autres auteurs de l’exploit étant Asashoryu dans la fameuse année 2005, Chiyonofuji en 1985, Taiho en 1963 et Futabayama en 1941).


Quel combat d’Aoiyama ! Sans complexe, le Bulgare, qui se sait vulnérable au mawashi face à Kisenosato, attaque l’ozeki à grands renforts de tsuppari qui rappellent un certain yokozuna hawaïen. Las, il manque un poil de précision sur quelques-unes de ses charges, permettant à Kisenosato, très lucide lui, de se reprendre et de prendre d’une unique poussée l’avantage quand Aoiyama perd son élan suite à un manqué. Le Bulgare pourra nourrir quelques regrets car il avait ce qu’il faut pour tomber l’ozeki aujourd’hui.


Kakuryu alterne poussées et tirages sur Homasho qui n’a jamais une seconde pour respirer. L’ozeki l’emporte sans peine au final. Trois ou quatre tsuppari bien placés, Chiyotairyu fait parler la poudre face à Takekaze, et devrait rejoindre à minima les joi-jin au prochain basho, mais le pensionnaire de la Kokonoe a sans doute dans sa ligne de mire un possible sansho et une place en sanyaku. C’est tout à fait possible. Neuvième succès pour le dernier hiramaku au contact des cadors.


Grosse puissance d’Ikioi qui passe son bras gauche sous l’épaule de Shotenro pour soulever son centre de gravité et permettre une expulsion en force. Ikioi est le seul et unique kachi-koshi du jour.


Rusé comme toujours, Aminishiki a le physique pour résister aux poussées un peu désordonnées de Shohozan et le sens du timing pour esquiver au moment opportun et laisser sortir seul le désormais ex-komusubi. Le Renard est toujours en quête d’un retour en sanyaku. Okinoumi est trop fort aujourd’hui pour Kyokutenho, qui semble sur ce combat faire son âge. Sortie nette au mawashi. Décalage manqué pour Myogiryu qui offre tout son côté à Toyonoshima, facilitant la tâche à Passepartout.


Prise profonde de mawashi trop facilement concédée, Takayasu n’est pas très lucide de faire ça face à Tenkaiho dont la puissance physique n’est pas à prouver. Sortie du dohyo et des joi-jin pour le jeunot. Basho « off » pour Tochinowaka qui retrouve en novembre ses réflexes de grand tout mou. Toyohibiki en profite avec sérieux et l’expulse d’une main. Seul l’avenir dira si le grand espoir du sumo japonais, Endo, a eu raison de prendre le gros risque de combattre sur une blessure pour conserver son rang en makuuchi. En tout état de cause, son pari est réussi sur le plan comptable avec un cinquième succès probant, toute en stabilité d’appuis malgré les déhanchements forcenés de l’autre lutteur combattant sur une blessure à peine refermée, Yoshikaze. Gagamaru ne parvient pas à éloigner Takarafuji du mawashi, une erreur que ce dernier convertit par une projection gagnante à défaut d’être esthétique. Tsuppari et nodowa avec une prise de mawashi pour finir : recette simple et efficace pour une victoire nette de Sadanfouji sur Tamaasuka. Le sumo de recul de Tokitenku n’est pas payant face à Tamawashi, bien décidé à faire mentir des statistiques contraires (10-1 avant l’affrontement du jour).


Kitataiki, en revanche, ne défie pas la logique en battant nettement en yorikiri Fujiazuma, adversaire qui lui réussit plutôt bien. Succès net de Kyokushuho qui anéantit Jokoryu en uwatenage. Le yokozuna universitaire aura du mal à sauver sa place en division reine.


Grosse puissance d’Osunaarashi qui, s’il a toujours un tachiai trop relevé à la Baruto, se montre très solide sur ses appuis dès le mawashi de Tokushoryu agrippé. Victoire probante de l’Egyptien qui s’offre enfin une fiche positive.

En juryo, le duo de la Kokonoe continue de mener les débats. Les poussées gagamaresques de Chiyomaru ont bien vite raison d’Azumaryu, vite dépassé. De son côté, Chiyootori, moins vif, expulse tout aussi solidement Sotairyu, en dépit du décalage final de ce dernier qui manque d’atteindre son but. Si les deux vont à ce rythme jusqu'au terme, le kettei-sen qui leur est promis sera le premier depuis les frères Hanada opposant deux frères do-beya. Deux lutteurs s’affrontant ce mercredi suivent le duo de tête, dont un autre rikishi de l’ex-yokozuna Chiyonofuji. Grosse résistance de Satoyama, une fois de plus placé sous la tête de son adversaire dans une position favorable à un petit gabarit mais difficile à tenir physiquement. Le combat contre Chiyoo dure pourtant, mais l’essentiel de sa fin est une poursuite de Chiyoo à laquelle Satoyama tente – vainement au final – de résister par des tirages en recul. Joli à voir, cela dit.

Takanoiwa n’abdique pas ses espoirs de makuuchi, avec une résistance farouche à la tawara sur la prise au mawashi de Yoshiazuma, avant de contrer avec plus de succès le grand gabarit de son adversaire. Kagamio, lui, n’est plus qu’à un succès du graal après sa victoire non moins convaincante, en force, sur Asahisho. Solide victoire en yorikiri pour Terunofuji, tout proche du kachi-koshi et d’une possible accession en makuuchi ? Quelle ascension du Mongol, il faut bien le dire. Gros combat en oshi entre Daikiho et Chiyonokuni, l’ancien universitaire se révélant plus costaud à ce bras de fer. Kimurayama tente bien d’éloigner Asasekiryu de son mawashi, mais dès l’instant où le Mongol l’attrape, les jeux sont faits. Sokokurai connaît encore des difficultés physiques, mais peut-être simplement dues à son poids trop léger qu’à son absence prolongée pour soupçons (infondés) de yaocho. Il est balayé en deux tsuppari par Homarefuji. L’alternance de poussées et tirages de Wakakoyu n’a jamais réussi à Wakanosato, et ce n’est pas au crépuscule de ce dernier que cela risque de changer. Défaite sans appel pour une perspective de retour qui s’estompe de plus en plus. Le poing serré de Tokushinho en dit long sur la motivation du poids lourd, vainqueur en deux poussées de Seiro impuissant. Gros étau en kimedashi pour Daido qui enserre Oiwato dans ses pinces de crabe avant de placer un hatakikomi finement vu dans le timing. Sale temps pour les sekitori de la Sadogatake, avec trois kyujo et un dernier lutteur, Kotomisen, en voie de sortir des rangs salariés. C’est pourtant lui qui l’emporte ce jour, plombant Higonojo qui pouvait se rassurer complètement sur son sort futur. Difficile de savoir si l’épaule largement bandée de Tanzo a à voir avec ses sous-performances ce basho. Toujours est-il qu’il subit le combat face à Kawanari, monté en juryo, et ne doit son salut que par un fort habile Kotenage en recul. Les espoirs de montée de Kawanari prennent l’eau.

Le dernier combat de makushita met aux prises les deux anciens sekitori poids léger Takanoyama et Kitaharima, le premier s’avérant comme souvent plus technique pour compenser le déficit de puissance. Belle victoire en projection après un combat mouvementé. Tosayutaka continue de mener logiquement la division, son dernier adversaire ne sera autre que Masunoumi, l’ancien espoir Saishin, qui a bien déçu les monts et merveilles qu’on attendait de lui. Arawashi, quant à lui, assure sans peine sa montée avec un cinquième succès sur Sadanoumi. Les anciens sekitori Kizenryu et Kimikaze l’emportent. En sandanme, la lutte se circonscrit désormais à trois rikishi, Hochiyama étant largement favori face à Baraki et Shineyama, même si ce dernier longtemps blessé et banzuke-gai, présente une ligne de stats très intéressante. En jonidan, Keitenkai est ultra-favori de cette division pléthorique. En jonokuchi, le yusho aura du mal à échapper à la heya martyre, Kotoninsei et Kotonoshima ayant toujours une longueur d’avance sur leurs adversaires.