Aki basho 2013 – 13ème journée (Jusannichi-me)

Kisenosato m'a tuer

Le regretté (ou pas ?) maître Vergès aurait peut-être bien eu du plaisir, comme il le fit pour Omar Raddad, à défendre l’ozeki Kisenosato, coupable tout désigné ce jour d’un crime terrible : la mort du suspense du cet Aki basho 2013. On espérait tant du week’end tout proche avec une triplette de feu Hakuho-Kisenosato-Harumafuji (ce dernier se voyant possiblement mis en examen pour complicité dans l’affaire qui nous occupe) qu’on avait omis un paramètre essentiel : la capacité quasi surhumaine de l’ozeki le plus régulier et solide du plateau à connaître des absences, en particulier quand les enjeux deviennent élevés et qu’il faut mettre ses tripes et son talent sur la table. Une fois de plus, Kisenosato vacille à l’instant de vérité, et la possibilité même d’un kettei-sen dimanche apparaît hypothétique, voie complètement délirante. On se raccrochera encore d’ici demain à ce fragile espoir.
A chaque fois donc qu’on commence à fonder des espoirs sur Kisenosato, celui-ci se fait un plaisir de les décevoir. Incapable de trouver une quelconque ouverture sur le mawashi de Gooeido, l’ozeki est contraint d’évoluer en mode passif face à l’oshizumo du sekiwake, qui l’emporte rapidement, douchant les espoirs de la foule qui ne peut que se reporter sur le frêle espoir d’un exploit de Kakuryu pour relancer la machine. C’est maigre.

D’autant que Hakuho, mort de faim comme on l’a rarement vu, se rue sur l’ozeki qui décroche certes une prise sur le côté, mais doit se désaxer pour tenter la projection. Hakuho est trop solide pour se laisser emporter par la vague et sort avec une grande autorité son vis-à-vis. C’est clair, il a beau avoir chuté contre toute attente une fois lors de ce basho, il n’en demeure pas moins encore une fois le patron incontesté. On imagine mal une double défaite pour lui ce week-end, même s’il a connu pareille situation à Nagoya. La situation était alors différente, car le yusho lui était d’ores et déjà acquis au moment d’entamer le sprint final. Le 27^ème titre est tout proche.

Kotoshogiku dispose nettement, dans son style favori en gaburi-yori, du yokozuna Harumafuji, trop dans l’axe pour espérer rivaliser avec l’ozeki sur le plan de la puissance. Espoirs achevés pour le yokozuna en ce qui concerne le yusho, la confrontation de dimanche n’aura d’enjeu qu’en cas de victoire de Kisenosato demain. Kotoshogiku décroche lui un kachi-koshi de soulagement.

Les tirages d’Aoiyama sont inefficaces et contre-productifs face à Myogiryu qui ne perd pas la constance de son action et repousse le Bulgare hors des limites, gardant encore un espoir de conserver son rang. Endo rencontre aujourd’hui son premier sanyaku, et la leçon d’expérience lui sera profitable : trop obnubilé par la recherche du mawashi, le gakusei yokozuna laisse Tochiozan prendre le contrôle du combat et quand il veut imprimer sa poussée, il est trop tard et il se fait tanner par une projection magistrale. Endo s’en remettra.

Takayasu ploie sous la poussée puissante de Toyohibiki, mais comme souvent ce dernier met trop son corps en avant, et c’est une chute imparable quand son adversaire peut se dégager sur le côté, ce qui est le cas aujourd’hui. Miyabiyama n’aurait pas désavoué sa chute façon crêpe.

Shohozan, qui entame fort par des harite, a le tort de venir au mawashi face à l’allonge supérieure d’Okinoumi. Tentant une projection désespérée, il est néanmoins logiquement vaincu sur yoritaoshi. Deux poussées puissantes et Chiyotairyu s’écroule à terre, mais non sans avoir sorti Ikioi impuissant du cercle. Shotenro avait son combat en mains mais manque d’opportunisme, laissant Tararafuji revenir et planter un yorikiri. Désaxé par Takekaze, Kaisei pense avoir trouvé la solution par un kimedashi, mais se fait brusquement contrer par un génial uchigake du nabot. Tokitenku tente, en bon joueur de rugby, de passer par les ailes, mais Tochinowaka a bien lu le mouvement et pousse de côté suffisamment fort pour s’éviter une déconvenue. Aminishiki, aussi fatigué que Homasho en cette fin de basho, s’en sort mieux en dominant en force l’Apache avant de lui faire toucher terre d’un uwatedashinage. Henka day pour Kitataiki qui sauve sa mise pour l’instant en bluffant Jokoryu. Combat simple et efficace de Kyokutenho, grandement aidé par son solide bras droit ancré sur le mawashi de Sadanofuji pour un yorikiri tranquille. Le vétéran, kachi-koshi, sera joi-jin au minimum. Oshidashi net de Masunoyama qui plombe un peu plus Aran, à la ramasse sur ce tournoi. Tamawashi a bien compris ce coup-ci comment battre Toyonoshima (amoindri ce basho il faut le dire) : l’empêcher de raccourcir la distance. C’est fait et bien fait par Tamawashi qui décroche ainsi le kashi-koshi. Asahisho se la joue mobylette à tsuppari face au tracteur Fujiazuma, mais c’est en vain, le plus petit des deux restant trop dans l’axe de son lourd adversaire, qui l’emporte sur oshidashi. Un pas en avant, deux pas en arrière : le sumo à la géorgienne est simple, fait par Gagamaru. En tout cas, ce jour, efficace, Tenkaiho en faisant les frais. Wakanosato fait de plus en plus peine à voir, aujourd’hui c’est Kotoyuki qui fait office de bourreau, repoussant en force et des bras le malheureux vétéran. Belle poussée de Tamaasuka qui sort en force Tokushoryu.

Relance des affaires en juryo, Kagamio connaissant son deuxième revers de la quinzaine aux mains d’un des nouveaux chouchous du public, Osunaarashi, pris en sympathie par les travées du Kokugikan. Le combat du jour en juryo est aussi la surprise du jour donc, puisque l’Egyptien montre un joli sens du placement et de l’adversaire en plantant un hatakikomi dans un timing parfait. Si les espoirs de yusho sont quasi nuls pour le vent de sable, la makuuchi se rapproche et c’est mérité. Terunofuji, décidé à défendre ses chances jusqu’au bout, a eu raison de ne pas lâcher l’affaire derrière Kagamio. La promotion éventuelle de Chiyootori en makuuchi en fait les frais, le poids lourd étant sorti par son adversaire passé dans son dos.

Combat de lutteurs en difficultés entre Seiro et Sokokurai, le premier cité parvenant à faire faire un tour et demi de dohyo à son adversaire en tirage avant de le sortir, pour un piètre mais salutaire succès. Takanoiwa ne se laisse pas blouser lors d’un combat largement dominé par la tentative de crochetage désespérée de Sotairyu pris sur l’arrière, et sorti au final tranquillement. Asasekiryu, mal engagé face à Kyokushuho, tente un hatakikomi mal réalisé qui se concrétise en une sortie rapide. Victoire claire et nette d’Azumaryu, bien campé en double prise sur le mawashi de Tanzo. Kachi-koshi pour le Mongol qui peut encore rêver de makuuchi. Encore un combat hyper spectaculaire de Takanoyama, qui décide d’aller au mastic face à Oiwato avant de revenir à ses bonnes tactiques de vivacité extrême et de jeux de prise de bras. Le Tchèque, repoussé violemment, parvient à s’écarter suffisamment de la trajectoire à l’instant fatal pour qu’un mono-ii soit provoqué, qui décide logiquement d’un torinaoshi tant l’issue était incertaine. C’est plus clair en revanche au deuxième combat, remporté nettement par Oiwato devant un Tchèque décidé pourtant à en découdre, mais trop léger (comme d’hab). Soufflé par la déferlante Tokushinho, Daikiho se retrouve sorti avec violence et sur oshitaoshi. Satoyama part délibérément au contact avec la tête baissée, tactique risquée mais payante face à Daido qui se retrouve bluffé par le retrait du petit lutteur, vainqueur par le populaire (depuis hier) katasukashi. Akiseyama se montre trop peu réactif face à Wakakoyu pourtant pas au mieux, la bombe en profitant pour lui bloquer le bras pour un succès assez facile et qui le soulage au banzuke. Akiseyama n’est lui pas sorti d’affaire, tout comme Chiyoo, enserré dans les longs bras de Yoshiazuma. Nouveau combat d’échange pour Kitaharima, que les shimpan veulent décidément tester. C’est cette fois-ci Kairyu qui tente sa chance face au poids léger, sans plus de réussite, Kitaharima retrouvant ses jambes (et surtout ses bras) face au danger imminent. La miscibilité entre divisions risque d’être très limitée en novembre. Pas plus de réussite pour Nionoumi qui se heurte au mur Chiyomaru qui, très vif, le baffe avant de s’écarter pour le laisser plonger.

Défait nettement en makushita par Kihonoumi (à la surprise générale), Arawashi abandonne doublement yusho et montée en juryo. Situation encore très incertaine sur le plan des montées/descentes donc, mais on peut avancer que la liste des prétendants se réduit désormais et dans cet ordre à Kotomisen, Kimurayama et Tochihiryu, dont les derniers combats seront décisifs. Pour la descente, avec le peu de montants disponibles, seuls Chiyomaru et Kitaharima apparaissent désormais véritablement en danger.