Aki basho 2013 – 12ème journée (Juinichi-me)

Hakuho en père tranquille ou Kisenosato pour le renouveau

La question, hormis si l’ozeki devait gaffer demain face à Goeido face auquel les confrontations sont dernièrement équilibrées, devrait être dans tous les esprits samedi. Nul doute que l’ozeki, qui tente de mettre fin à une longue disette japonaise sur le yusho de makuuchi, aura le soutien de tout un peuple (à tout le moins des travées du Kokugikan). Car si la victoire de Hakuho ce jour ne faisait que peu de doutes, celle de Kisenosato n’était pas aussi évidente d’emblée et montre que l’ozeki a peut-être passé un cap sur le plan mental. En même temps, ça fait tellement longtemps qu’on l’espère qu’on ne sait plus s’il faut vraiment y croire…
Le combat du jour décide de celui qui va se retrouver dernier lutteur au contact du yokozuna de tête. Entre Harumafuji, qu’on croyait perdu après deux revers très prématurés, et Kisenosato, qui a cédé plus tardivement, c’est un combat d’importance, un classique puisque le 46^ème entre les deux rikishi, et qui tient toutes ses promesses. Kisenosato jaillit comme un bulldozer et trouve quasi instantanément l’ouverture, Harumafuji se retrouvant à la tawara, genoux pliés et écartés, mais Kisenosato loupe l’occasion et le combat change d’âme, Harumafuji trouvant alors le chemin du mawashi. C’est alors l’ozeki qui doit se rétablir miraculeusement, mais est en fâcheuse posture face au yokozuna positionné très bas dans sa garde. Là, c’est l’ozeki qui trouve une inspiration géniale en attendant la poussée du yokozuna pour mieux faire un pas en arrière et appuyer sur sa nuque. Les zabuton peuvent voler, et franchement, Harumafuji n’aura pas à rougir ni à s’expliquer sur celle-là. Katasukashi au terme d’un combat épique, du grand sumo.


On a bien cru un instant à la surprise du chef lorsque Kotoshogiku entame sa série de bonds qui ont fat sa renommée. Mais en face, c’est Hakuho, quand même. Le yokozuna fait dans la simplicité, avec un peu de résistance physique, un tirage accompagné d’une prise au mawashi pour un sukuinage dépouillé.


Derrière Hakuho et Kisenosato, trois hommes sont encore mathématiquement en course, même s’ils ne doivent pas se faire trop d’illusions sur leurs chances de titre. Outre Harumafuji, Kakuryu, transparent mais efficace sur ce basho, et Endo, qui s’affirme comme un chouchou des sunakaburi, sont à la fête. Kakuryu dispose facilement en déviant sa trajectoire de Toyohibiki décidément récidiviste d’une certaine naïveté et qui manque cruellement de lucidité en ces circonstances. Katasukashi pour l’ozeki.


Endo, performant jusque là, se fait prendre en défaut par la grosse henka de Tokushoryu qui suit son avantage pour le sortir au mawashi. Un mono-ii est toutefois convoqué (car Tokushoryu a posé son pied gauche en plaçant sa poussée finale), qui décide d’un torinaoshi sous les acclamations de la foule, Endo étant visiblement très populaire. Repoussé par Tokushoryu, l’universitaire se stabilise à la tawara et contre immédiatement, faisant fi de la tentative de projection de dernière minute de son adversaire pour remporter (avec un sourire qui n’amusera pas les caciques de la Kyokai) une victoire qui le rapproche d’un possible sansho.


La « spéciale Isegahama » d’Aminishiki était visiblement attendue par Goeido, qui se facilite ainsi les choses pour un yorikiri express. Soulagement pour le sekiwake, qui visera sans doute plus d’ici dimanche.


Le coup est bien joué par Okinoumi sur Myogiryu en lui enserrant les bras. Le sekiwake ne voit comme échappatoire que de reculer, ce qu’anticipe Okinoumi pour un succès facile. La partie sera compliquée pour le sekiwake. Performance remarquable en revanche pour Okinoumi au rang traditionnellement le plus compliqué du sumo. Tochiozan n’est pas encore viré de sanyaku : le komusubi entame son combat contre Kaisei de la meilleure des manières en passant sous les aisselles du Brésilien. Face à la résistance du gros gabarit, il déclenche pour finir un violent tsukiotoshi. C’est en revanche fini pour Takayasu, victime de Chiyotairyu qui lui passe sur le côté pour un yorikiri relativement facile.

Deux matta entre Aoiyama. Le Bulgare semble avoir la main en repoussant largement son adversaire, mais c’est ce dernier qui contre finalement et trouve, lui, la solution. Shohozan repousse en force un Kyokutenho qui commence à montrer des signes de fatigue en cette fin de basho. Agoni de tsuppari, Takarafuji trouve en Fujiazuma un adversaire qui lui réussit et qu’il domine sans peine en le laissant choir seul après s’être écarté brusquement. Tokitenku parvient à se placer sur le côté de Gagamaru, sa plus grande faiblesse, et le fait tournoyer deux ou trois fois sur lui-même avant de placer un uwatedashinage (ou ashitori, c’est selon). Jolie conclusion, en tout cas. On ne pensait pas revoir Kotoyuki aujourd’hui, lui qui était sorti sur chaise roulante après son revers d’hier. Kitataiki peut-être non plus, qui fait un premier matta. Kotoyuki s’en sort avec une henka des familles qui fait un peu jaser dans les travées du Kokugikan mais lui évite pour l’heure le make-koshi (en même temps qu’elle lui apporte deux kensho). Hatakikomi de justesse pour Toyonoshima qui applique sur Takekaze la tactique du roseau qui plie mais ne rompt point, après une superbe henka évitée de justesse. Drôle de tactique initiale d’Aran qui met son avant-bras en opposition sous la gorge de Tenkaiho, avant de revenir au mawashi, ce qui lui est fatal sur le shitatenage du poids lourd. Yorikiri rapide de Shotenro qui déroule face à Sadanofuji. Impuissant aujourd’hui face à la poussée frontale de Tochinowaka, Homasho ternit un peu un basho jusqu’ici convaincant pour son retour de blessure. Défaite sans appel de Jokoryu, repoussé par Tamawashi au point que son genou doit être solide pour supporter l’extension arrière qui en découle. Jolie victoire de Masunoyama qui pour une fois – ce qui n’est pas une sinécure quand on connaît sa condition physique – tient la distance et surtout parvient à passer les bras sous la garde de Tamaasuka pour un yoritaoshi net et sans bavure. Victoire en oshi pur pour Chiyonokuni qui renvoie définitivement ce qui reste de Wakanosato en juryo. Pas sûr que l’ancien sekiwake éternel ne soit revu en makuuchi un jour.

En juryo, statu quo pour les deux leaders, mais le revers de leur dernier poursuivant immédiat les laisse tranquille avant l’explication finale. Nouvelle victoire pour Kagamio qu’on n’arrête plus. Opposé à son compatriote Takanoiwa qui a la makuuchi en ligne de mire, le leader encaisse l’atari et les premières poussées et appuie sur la nuque de son adversaire mal placé pour un onzième succès encore une fois probant. Qui pourra l’arrêter ? Il ne reste sans doute plus qu’un seul rikishi qui en ait les moyens. Terunofuji a la gnac, en témoigne son puissant matta de départ. C’est toutefois Azumaryu qui mène les débats dans un premier temps grâce à une double extérieure, avant que Terunofuji ne contre pour un dixième succès tout en puissance. Combat raté en revanche qui inspirera on l’espère une remise en cause de son sumo à Osunaarashi, la position trop haut à l’atari en étant la cause majeure. Kyokushuho en profite pour décrocher le kachi-koshi et peut envisager un retour en makuuchi.

Dur combat pour Sokokurai, qui doit faire face au petit poison Satoyama placé bas sous sa garde. Un combat dur et physique, que Sokokurai remporte au bout de l’effort, ce qui est encourageant pour l’ancien paria longtemps privé de sumo. Le tsuridashi est une technique spectaculaire mais qui peut être dangereuse : Chiyoo l’apprend à ses dépens, tentant la passe sur Asasekiryu qui se révèle un peu lourd, et surtout opportuniste en plaçant un superbe crochetage immédiatement après avoir été reposé. Kachi-koshi pour le vétéran mongol. Affaire d’allonge entre Chiyootori et Akiseyama, les prises profondes mettant les deux hommes au supplice physiquement. C’est Chiyootori qui s’en tire le mieux, Akiseyama pouvant regretter la situation de départ où son adversaire n’avait pas la main sur le tissu. Parti en boulet de canon, Tokushinho évacue de son passage Daido à qui il inflige le make-koshi. Confrontation tendue entre Oiwato et Tanzo, Oiwato ayant les meilleures opportunités au départ avec une belle prise avant mais ne parvenant pas à concrétiser. Tanzo sort vainqueur et se donne un peu d’air. Le problème des tactiques de Takanoyama, c’est que ses adversaires commencent (pour la plupart) à y voir clair. Sa défaite inéluctable face à Homarefuji n’est que le symbole de sa lente chute depuis plusieurs basho, qu’il va lui être ardu d’enrayer. Enfin une victoire de Seiro qui profite de la passivité de Chiymaru pour décrocher une salutaire prise de mawashi et raccompagner difficilement le poids lourd vers la sortie. Seiro se sauve sans doute, et met son vis-à-vis dans l’embarras. Piètre défaire de Daikiho qui se laisse embarquer dans le sumo de recul imposé par le grand Yoshiazuma. Chute assurée. On comprend quelque peu la réticence de Wakakoyu à laisser Sotairyu s’approcher de son mawashi, car à l’instant où celui-ci décroche une prise lointaine, il plante un uwatedashinage qui atteint sa cible. Combat d’échange direct entre Sakigake, jamais parvenu en juryo, et Kitaharima, qui a des difficultés à y demeurer. C’est pourtant ce dernier qui sauve ses miches avec son sumo habituel, vif voire désordonné, empêchant le lourd Mongol élève de l’ancien yokozuna Onokuni de prendre les bras du poids plume. Sakigake devra espérer un meilleur sort au prochain basho.

La situation entre juryo et makushita est toujours aussi indécise, une seule place vers le haut étant promise avec l’intai de Baruto. Deux rikishi sont à priori en danger immédiat en cas de nouvelle défaite, Kitaharima et Chiyomaru. Les candidats à la montée ne sont pas non plus pléthore, Arawashi étant en première ligne en cas de victoire demain, Nionoumi, Kimurayama et Kotomisen devant eux aussi défendre leur chance encore.