Natsu Basho 2013 - 15e journée (senshuraku)

Le Bayern à lui tout seul

En ce lendemain de Ligue des Champions qui a vu triompher l’écrasant Bayern d’une séduisante équipe de Dortmund terrassée par son déficit physique en toute fin de match, on attendait de cette dernière journée du Natsu basho 2013 que Kisenosato puisse jouer à tout le moins le rôle du challenger en mettant une certaine pression sur le dai-yokozuna – si tant est que la chose eût été possible – avant que celui-ci n’ait à affronter son yokozuna de compatriote. Autant dire que Kisenosato joue forcément gros en ce senshuraku, la victoire étant indispensable s’il veut avoir un espoir de kettei-sen en cas de miracle venu de Harumafuji. Mais pas de miracle, pas de club des ozeki qui tienne sur ce combat : Kotoshogiku fonce tel un ouragan sur Kisenosato et tue le peu de suspense qui restait sur ce tournoi, donnant le yusho à Hakuho avant même qu’il n’ait à combattre.

C’est donc sans aucune pression que Hakuho aborde son combat face à Harumafuji, qui relève plus d’une problématique de suprématie, totale ou partielle. A voir ces deux lutteurs, on pense immédiatement au duo déséquilibré que formaient par exemple Taiho et Kashiwado. A la différence que les deux lutteurs précités étaient les meilleurs amis du monde. Non pas que les deux yokozuna mongols se détestent, ils ne se fréquentent pas plus que cela. Mais leur rivalité est analogue, avec l’un des deux dominant l’autre, toujours capable de coups d’éclat. Un temps estompée au cours d’une année 2012 terne (à son échelle) pour Hakuho, cette domination a repris de plus belle en ce début 2013, avec un deuxième zensho-yusho consécutif. Car le musubi-no-ichiban accouche d’un combat à sens unique, Harumafuji n’ayant à aucun moment une seule véritable opportunité de mettre en danger son plus grand rival.

Pas plus qu’il n’aura été une seule fois mis en danger au cours de la quinzaine. Hakuho rejoint donc Asashoryu au Panthéon du sumo, avec une vingt-cinquième Coupe de l’Empereur. Il ne faut pas s’y tromper : sauf blessure, il y a fort à parier qu’en 2015 les records de Taiho et Chiyonofuji seront à portée de canon. Peu d’hommes ont autant dominé leur art que lui.

Le Beckham du sumo pour les Japonais, Kotooshu, reste encore très populaire à en entendre les encouragements au moment où il se présente pour jouer son destin face à Kakuryu. Qui peut alors douter qu’il parvienne aussi aisément à battre l’auteur de dix victoires jusqu’alors, d’une manière quasi humiliante, le Mongol lui laissant son dos bien ouvert ? On ne parlera pas de yaocho, mais le club des ozeki reste une réalité assez tangible au vu de ce simulacre de combat. Grosse surprise qui ne va pas plaire au comité du banzuke : Tochiozan échoue dans sa quête d’une septième victoire et libère donc clairement un slot de sanyaku qu’il va être compliqué de remplir. Okinoumi, déjà parti des sanyaku, est l’exécuteur du komusubi. Goeido, lui, ne rate pas l’occasion sur Tokitenku bien naïf, qui chute juste après l’atari sur un hatakikomi prévisible. Expéditif face à Chiyotairyu lui-même auteur d’un très bon basho, Myogiryu yorikirise son adversaire et assure une place de premier sekiwake en même temps qu’un début d’ozeki-run qu’il lui faudra conformer dès Nagoya. Il en a les moyens. Le cinquième gino-sho – déjà – de sa carrière vient récompenser un basho admirable. C’est d’ailleurs le seul sansho du basho.

Belle résistance à la tawara d’Aoiyama mais Aminishiki est trop bien placé sous la garde du Bulgare pour que sa résistance ne soit autre chose que vaine. Kitataiki bloque à l’atari les bras de Tochinoshin pour vaincre sans contestation possible un Géorgien aux fraises sur ce tournoi. Il sera de retour en juillet, soyons-en sûrs. Pas de henka pour Aran en ce dernier combat qui le voit batailler fermement pour le contrôle du mawashi avec Takarafuji et tomber malencontreusement alors qu’il allait placer un uwatenage vainqueur. Mal placé au sortir de l’atari, Toyonoshima cède face à Takekaze qui peut espérer, au vu du banzuke, faire une remontée jusqu’en sanyaku, aussi étonnant que cela puisse paraître. Toyonoshima sera hors des joi-jin en juillet, il faudra compter sur lui.

Shohozan trop pressé rate un tsuppari sur Kyokutenho. Le vétéran des vétérans en profite pour remporter un succès facile qui le remontera pile au milieu du banzuke. Assaut furieux avec un nodowa à décapiter un bœuf : Toyohibiki finit le combat plus gentiment au mawashi pour remporter son kachi-koshi. A la furia de Yoshikaze, Daido oppose une solide prise de mawashi. C’est donc lui qui logiquement remporte l’affrontement. Fujiazuma remporte évidemment son combat à 7-7 face à Homarefuji déjà out de makuuchi. Oshidashi net et sans bavures après trente secondes de combat furieux. Superbe combat entre Jokoryu et Masunoyama, les deux hommes montrant un fighting spirit digne d’éloges. Jokoryu a la vertu de la patience sous la violence des assauts, conscient des faiblesses de son adversaire qui termine l’affrontement à la limite du malaise. A force de faire preuve de trop de patience dans son combat, celle-ci devient de la passivité pour Kaisei, piteusement sorti par Sadanofuji, pourtant pas une référence sur ce basho. Un évitement bien placé avec une prise de mawashi en sus permet à Ikioi de conforter son kachi-koshi et d’effectuer une remontée vers l’élite pour la fournaise de Nagoya. Pas un instant Chiyonokuni ne peut se dépêtrer des lourds tsuppari de Gagamaru, qui aura effectué une quinzaine de bulldozer bien à l’abri au fond du banzuke. Onzième succès pour le Géorgien. Wakanosato va sans doute se maintenir encore un basho en makuuchi, remportant une victoire tranquille aux dépens d’Azumaryu. Mais il ne faut pas s’y tromper, il serait étonnant de le voir encore dans les parages à Kyushu. Oiwato aura pas mal tenté sur Chiyootori, mais pour une fois le sumo tête rentrée à l’intérieur n’aboutit pas à un tirage vainqueur de l’adversaire. Chiyootori expulse Oiwato et prévient la montée de celui-ci en makuuchi, sans doute. Mince consolation d’un basho cataclysmique pour Daikiho avec sa victoire convaincante sur l’expérimenté (mais sur le déclin, nettement) Asasekiryu.

Le combat décisif pour le juryo yusho oppose donc Kotoyuki à Tokushoryu. Extrêmement genki, c’est Kotoyuki qui expulse au terme d’un court assaut son adversaire pour s’adjuger son premier yusho en carrière en même temps qu’une solide promotion en makuuchi.

Après trois poussées brutales, Tochinowaka profite d’un assaut manqué de Tamawashi pour passer en arrière de son adversaire, et remporter un succès facile. Combat équilibré entre Tanzo et Asahisho, mais c’est le premier qui, au mawashi, écroule son adversaire qu’il enfonce dans un lourd make-koshi. Entre Tokushinho et Takanoiwa, on voit tout de suite que celui qui l’emportera sera celui qui imposera son sumo à l’autre. Au terme d’un échange musclé, Takanoiwa parvient à raccourcir la distance. Les jeux sont alors faits en sa faveur, sur un okurinage, kimarite assez rare. Homasho n’est toujours pas au mieux, comme en témoigne son sumo de recul, mais au moins cela fonctionne-t-il pour lui, Tamaasuka faisant preuve de naïveté ou de précipitation. En dépit de son gabarit inférieur, C’est Sotairyu qui parvient à trouver une prise de mawashi très profonde au détriment de Kizenryu qui, en mauvaise posture, doit concéder le revers. Déjà relégué, Chiyoo livre un combat courageux et plein en yotsu-zumo face à Satoyama qu’il sort au final, ce qui lui permettra d’adoucir sa chute. Combat en maîtrise pour Nionoumi qui se méfie du talent au mawashi d’Oniarashi et lui dénie donc toute prise de mawashi avant de lui asséner un coup fatal derrière le crâne. Kachi-koshi pour Nionoumi qui sera tout proche de la makuuchi en juillet. Yorikiri en prise nette et puissante pour Kagamio qui conclut de superbe manière un superbe basho en déplaçant le montagneux Tenkaiho avec autorité. Impatient d’y aller, Wakakoyu finit par provoquer le matta sous l’attentisme de Sagatsukasa. C’est au final pour remporter étonnamment une victoire en yorikiri du début à la fin, une rareté pour ce spécialiste du moulin à baffes. Akiseyama sait ployer sous l’assaut de Tochihiryu pour mieux le contrer une fois ses forces épuisées. Jolie victoire plus tactique qu’il n’y paraît sous la vigueur des assauts. Face à Kimurayama complètement anesthésié (j’aimerais pouvoir en dire autant), Takanoyama n’a qu’à envoyer quelques baffes pour distraire avant de faire le coup du « J’te vois, J’te vois plus » et achever en okuridashi. Chiyoarashi sauve sans doute sa place en juryo en venant à bout de la grande carcasse de Yoshiazuma, qui a des centimètres mais ne sait pas les protéger efficacement contre de petits gabarits. Troisième affrontement en juryo sans l’avoir été pour Chiyomaru, qui ne sera pas promu pour juillet mais plombe les affaires de Kitaharima et va faire un beau rapproché grâce à un combat largement dominé face au poids-léger.

En ce qui concerne le tableau d’honneur des promotions et relégations, les choses risquent d’être un peu complexe pour ce qui concerne les sanyaku. Si les six premiers ne posent aucun souci (Hakuho-Harumafuji-Kisenosato-Kotoshogiku-Kakuryu-Kotooshu), c’est ensuite que les choses se corsent. Baruto, Tochiozan et Okinoumi sont out de sanyaku, Goeido devrait rester comme komusubi ou sekiwake ouest. Myogiryu sera sekiwake est, mais après ? Shohozan et Takayasu de M5 avec un 8-7 ? Takekaze de M6 avec un 9-6 ? Ou Tokitenku ? Il va y avoir des chanceux dans les promotions de juillet.

Pour la frontière makuuchi/juryo, les choses s’établissent probablement ainsi :

Descente en juryo : Daikiho, Azumaryu, Homarefuji, Chiyootori.

Montée en makuuchi : Tamawashi, Tamaasuka, Takanoiwa, Tokushoryu.


Entre juryo et makushita :

Descente en makushita : Chiyoo, Kimurayama, Kitaharima ?

Montée en juryo : Osunaarashi, Seiro, Endo ?