Encore un matin, où Hakuho va se réveiller en tête d’un yusho. Il suffira d’un signe du gyoji pour que le yokozuna, loin de vivre sa vie par procuration, refasse un yusho tout seul. Quand la musique du Kimigayo (hymne japonais) est bonne pour lui, il va au bout de ses rêves et nous donne (ce qu’il est, ses dons et ses – rares- défauts) pour s’approcher un peu plus de Taiho, son modèle…
Non, votre serviteur n’a pas abusé de cigarettes qui font rire histoire de faire ce revival de Jean-Jacques Goldman, dont la carrière est plus vieille que ne l’est même le yokozuna. Simplement, le titre de cette chronique se prête bien au parcours de Hakuho en ce mois de mars, en attendant un mode plus lyrique d’ici dimanche, trompettes d’Aida à l’appui.
Son opposition du jour est le sekiwake Baruto, pas loin de submerger l’autre yokozuna hier et qui démontre sur ce tournoi que, si tant est que son genou le laisse tranquille, il demeure une sérieuse force d’opposition en sanyaku. Après l’impact physique de l’atari, Hakuho et Baruto en viennent au mawashi, pour un combat de longue haleine où le Balte montre intelligence et sens du placement face à la patience du yokozuna. Si l’Estonien démontre que sa presque victoire de la veille n’était pas usurpée et qu’il a encore toute sa place dans le haut du panier, c’est tout de même Hakuho qui prévaut au final en plaçant au moment opportun une projection imparable. Le Mongol reste sur sa planète, de plus en plus seul.
Baruto méritant, un futur Kaiketsu bis ?
Comme hier, le yokozuna n’a qu’un seul poursuivant, mais dont le shikona n’est plus le même. Exit Kotoshogiku, c’est Okinoumi qui s’arroge le strapontin honorifique derrière l’Überflieger du tournoi. Combat viril entre Aran et Okinoumi, ce dernier conservant l’avantage jusqu’au bout par la grâce d’une prise plus affirmée.
Kotoshogiku a donc cédé et n’est pas encore kachi-koshi (ce qui devrait être une formalité, cependant).Face à lui Toyonoshima est quasiment dans un état second sur ce milieu de basho, le maegashira 4 ajoutant un deuxième ozeki à son tableau de chasse, en plus de sa kinboshi d’il y a deux jours. Kotoshogiku est exécuté sur projection intérieure au terme d’un combat court mais enlevé. Kisenosato est prévenu pour demain.
Toyonoshima impressionne.
Il est rejoint par six autres lutteurs (mis à part Toyonoshima) menés par l’autre yokozuna, Harumafuji, qui se refait la cerise même s’il a perdu toute emprise sur la course au titre. Le pauvre Shohozan se fait duper par inexpérience, croyant en un matta qui n’arrivera jamais. Harumafuji, le jeune rikishi bien enveloppé dans ses bras puissants, remporte un combat facile.
L’expérience, ça se paie…
Goeido profite intelligemment de l’excès de précipitation de Tochinoshin assez fréquent ce basho). Le sekiwake reste en course pour prolonger son ozeki-run. Henka ratée de Jokoryu, qui du coup se met en position très défavorable. Kitataiki n’a plus qu’à finir le job en poussée, pour achever Jokoryu sur une série bien moins enthousiasmante qu’en début de basho. Aoiyama profite du manque de vivacité de Sadanofuji pour contenir la poussée et finir le travail au mawashi, pour une nette victoire sur un adversaire peu inspiré aujourd’hui. Repoussé à la tawara par la violente charge de Takekaze, Fujiazuma trouve les ressources pour se décaler et laisser choir son adversaire au sol. Contré au dernier moment par Sotairyu, Wakanosato conserve suffisamment sa position lors de l’affaissement pour être jugé vainqueur d’un combat qui eût bien mérité un mono-ii.
Nouveau combat enthousiaste d’Ikioi, qui ne parvient toutefois pas à briser l’équilibre de Kisenosato, le genou du hiramaku cédant au final sous la poussée de l’ozeki. Pas au mieux, Kakuryu est repoussé de deux mètres par l’atari de Tochiozan, la seconde charge ne faisant que confirmer l’impuissance du Mongol qui vole au sol pour se retrouver à un score de parité qui risque de lui poser des soucis en fin de basho. La jeunesse et les poussées puissantes de Myogiryu viennent assez facilement à bout des tours de passe-passe et de l’expérience immense d’Aminishiki. Après le choc des nodowa, l’affrontement entre Takayasu et Tokitenku vient au mawashi pour un combat de longue haleine. Comme souvent avec le Mongol, la solution vient d’un crochetage, qui déstabilise suffisamment Takayasu pour que Tokitenku en vienne à bout d’une jolie projection.
Marathon pour Tokitenku, un hommage à Asasekiryu ?
Etrange défaite de Kaisei qui s’écroule quasi tout seul après l’atari, laissant Takarafuji tout heureux de sa bonne fortune. Chiyonokuni est sans armes face à la poussée violente de Toyohibiki, son décalage de trajectoire ne l’amenant qu’à finir sorti en okuridashi. Même impuissance pour Shotenro qui subit les tsuppari et l’oshizumo du double quintal de Gagamaru, vainqueur sans appel. La poussée de Kyokutenho est contrée in extremis par un uwatenage de Daido. Le mono-ii convoqué conclut à un torinaoshi, qui voit une quasi-redite, Kyokutenho ne faisant une nouvelle fois pas dans la finesse, et Daido sortant de la trajectoire pour laisser le vétéran mongol sortir tout seul comme un grand (qu’il est). Deux poussées et deux tirages sont suffisants pour que le feu-follet Yoshikaze tombe Oiwato, qui se relève frustré et dépité. Tamawashi expulse nettement le pourtant très lourd Masunoyama.
En juryo, Azumaryu est toujours aux avant-postes, mais sa marge autant que sa supériorité n’ont rien à voir avec la situation qui prévaut en makuuchi. Le Mongol a repris hier, avec la défaite d’Asasekiryu, son cavalier seul, qu’il poursuit ce jour en montrant un beau sumo défensif face au petit gabarit massif de Nionoumi qu’il finit par contrer et sortir en force.
Derrière lui, c’est un duo mongol qui est lancé à sa poursuite. Kachi-koshi pour Kyokushuho qui s’installe dans la place de prétendant au yusho en expulsant en oshizumo Chiyootori à qui il rend pourtant vingt kilos. Le Mongol paraît particulièrement fringant. Asasekiryu n’avait sans doute pas besoin d’une henka pour triompher de Yoshiazuma, bien emprunté sur ce basho. C’est pourtant ce qu’il emploie, avec une grande qualité technique il faut bien le dire.
Henka de Kotoyuki qui profite de la position trop avancée de Tokushoryu. Drôle d’uwatenage de Daikiho, l’ex-universitaire employant en fait une tactique d’esquive et ne touche qu’à peine Homarefuji lors de la sortie de celui-ci. Asahisho est impeccable dans son timing et les tentatives d’escapade de Takanoyama ne peuvent rien, le Tchèque finissant sa course dos à l’opposant pour une défaite nette. Combat plaisant en yostu-zumo avec deux prises extérieures droite identiques pour Tanzo et Takanoiwa, le protégé du dai-yokozuna l’emportant sur une aérienne projection. Modèle de projection d’Oniarashi qui sort un shitatenage d’école pour mettre Tenkaiho dans l’embarras, le nez dans la poussière. Combat plein et maîtrisé de la part de Tochihiryu qui assomme Tamaasuka de tsuppari et nodowa avant de l’achever sur un subtil tirage de poignet. Grosse henka de Kagamio qui évite les baffes de l’oshi-man Wakakoyu. Combat assez balourd entre Tokushinho et Kimurayama, ce dernier manquant plusieurs fois le coche pour finalement se faire sortir en force. On peut se faire deux remarques au sujet de Miyabiyama, soit « qu’est-ce qu’il fout (encore) là ? » ou « Quel courage ! ». Toujours est-il que l’ex-ozeki est sans doute à contempler (si l’on peut dire) pour l’une des dernières fois sur un dohyo, vaincu en poussée par Sensho qui lui rend pourtant la bagatelle de cinquante kilos. Même la fin de carrière de Chiyotaikai ne paraissait pas aussi embarrassante. Choc de gabarits et lutte au couteau étonnamment longue entre Akiseyama et Satoyama, les deux hommes allant au bout du bout de leurs ressources physiques. Le physique d’Akiseyama prévaut au final. Superbe affrontement. Chiyomaru a beau être lourd et puissant, ses charges manquent de précision, ce dont profite Hochiyama pour s’ôter un peu de pression. Le makushita est lui make-koshi.
Avec la défaite surprise de Wakamisho hier, c'est Kamei ui paraît le mieux placé pour un yusho qui lui assurerait en sus une promotion immédiate en juryo. Parmi les victoires notables du jour, celle de Chiyoarashi, en bonne position pour un etour éventuel, celle de Hamaguchi, lourd espoir japonais bientôt en zone de promotion sans qu'il ne puisse porter un chonmage, et celle de Kyokutaisei (du film "tu seras sumo"), kachikoshi à son meilleur rang en carrière. le reste du banzuke sera plus intéresst à suivre demain.
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