Le yokozuna Hakuho reste le seul dominateur de la division makuuchi au sortir de la douzième journée de ce Hatsu basho, premier basho de l'an de grâce 2011. Battu hier par Kisenosato, qui plus est pour la deuxième fois de rang (pour un total de trois kinboshi et trois ginboshi à son encontre), le dai-yokozuna remporte somme toute assez tranquillement son torikumi du jour face à son compatriote mongol Harumafuji. La lutte de tsuppari infligée par ce dernier décontenance pourtant quelques instants Hakuho, mais celui-ci fait preuve d'une mobilité qui force l'ozeki à accélérer son jeu de jambe, chose qui lui est fatale au final, quand il tente, après avoir saisi le bras gauche de son adversaire, de le contourner, son pied gauche ripant sur l'argile et le faisant piteusement choir au sol. Tsukihiza, une technique datée de 2001 et qui caractérise plus une erreur de l'attaquant qu'une prise en contre. Hakuho est plus que jamais en route pour un dix-huitième yusho.
Ce d'autant que ses adversaires censément les plus dangereux perdent le contact direct avec lui. Kotooshu, qui avait recollé à un succès, source d'espoir avant leur confrontation prévue demain, cède une fois de plus en fin de basho, cette fois face au komusubi Kakuryu. Le petit Mongol mène joliment son combat, décrochant une belle prise intérieure après avoir relevé le grand échalas bulgare à l'atari. Stabilisant sa position, il attend ensuite l'assaut de Kotooshu, qui place une très forte poussée en yori, pour le contrer et l'envoyer rouler au sol d'un shitatenage.
Les deux ozeki restant s'affrontaient aujourd'hui, et c'est sans surprise que le vétéran Kaio, à la recherche d'un dernier succès pour assurer son kachi-koshi, dispose de l'Estonien Baruto, déjà kachi-koshi pour sa part et à la motivation peu convaincante car décroché de la lutte au yusho. Le Balte offre quasiment son bras gauche à la pince de crabe droite de Kaio après l'atari, et un pas de côté de ce dernier lui permet de se retrouver en position dominante sur le côté de son adversaire. L'issue est dès lors inévitable.
Qui donc est alors le dernier adversaire de Hakuho qui reste un tant soit peu au contact*? Rien moins qu'Okinoumi, le rikishi d'Okinawa (et l'un des seulement quatre sekitori originaire de l'île, le dernier ayant été Wakanojo dans les années 1990). Passé inaperçu au regard de deux défaites concédées dans les quatre premières journées, il remporte aujourd'hui sa huitième shiroboshi consécutive, et s'assure pour ainsi dire un prix à l'issue de ce tournoi. De là à penser qu'il puisse représenter une menace contre le Tout-Puissant Mongol, il y a un pas difficile à franchir. C'est Kitataiki qui fait aujourd'hui les frais de la forme éclatante du lutteur au mawashi bleu des mers du sud. Pourtant bien parti, Kitataiki décroche une solide prise intérieure gauche sur le mawashi, et repousse, accule son adversaire à la tawara. Mais faisant preuve d'une souplesse de hanches étonnante, Okinoumi pivote en maintenant son adversaire par une prise de bras sous son aisselle gauche et une prise sur son avant-bras droit, et d'un mouvement tournant le tombe en tsukiotoshi. Sa progression sera notable en mars, et il faudra le surveiller à son meilleur rang en carrière.
Derrière lui, en compagnie de l'ozeki Kotooshu que l'on vient de voir, on retrouve le sekiwake Kotoshogiku et le maegashira 16 Tochinonada. La déconvenue de ce dernier, si triste soit-elle, n'est pas illogique, le vétéran ayant sans doute le besoin de souffler en cette fin de basho éprouvant, même s'il est déjà réussi. Kotokasuga, en situation de danger en cas de défaite, n'y va pas par quatre chemins et imprime une poussée bien trop forte et précise pour que l'ancien puisse y résister. Chapeau tout de même à Tochinonada que peu auraient attendu à ce niveau. Kotoshogiku, lui, reprend une marche en avant un temps interrompue par Kaio et Hakuho (chose loin d'être honteuse). Le sekiwake se sait presque imbattable dès qu'il peut passer au moins un de ses bras sous la garde de son adversaire et le soulever légèrement afin de mettre sa technique du kangourou en action. C'est précisément ce qu'il parvient à faire sur Yoshikaze, qui doit s'incliner malgré une furieuse résistance. Si le sekiwake convertit deux de ses trois prochains combats en succès, on pourra commencer à parler d'amorce d'ozeki-tori basho. Mais les espoirs japonais sont si régulièrement décevants sur la durée qu'on sera sans doute inclinés à la prudence.
En dehors de Kaio, trois autres rikishi décrochent aujourd'hui leur kachi-koshi*: Kisenosato, Goeido et Toyohibiki. Goeido passe près d'un revers face à Wakanosato, peu en verve en cette fin de basho, qui se recule face à la poussée du jeune pour le laisser choir au sol. Mais malheureusement pour le vétéran, il a du sortir du cercle avant, concédant son quatrième revers d'affilée. Il n'est toujours pas kachi-koshi. Les choses sont moins compliquées pour Toyohibiki, à qui il ne faut qu'une seul grosse poussée pour expulser en force Mokonami bien léger. Basho en demi-teinte pour le jeune bulldozer japonais que l'on attendait mieux à son rang dans le banzuke.
A la dérive sur ce basho, le meilleur Japonais de 2010, Tochiozan, est une cible facile pour Aran qui ne lui réussit pas du tout. Le Russe au sumo rugueux montre une belle performance, en soutenant la lutte de possession du mawashi après l'échange de baffes initial. Contré par Tochiozan qui place une poussée rageuse, le Russe a le temps de pivoter en saisissant le bras de son adversaire. Le mono-ii qui s'ensuit démontre que la jambe gauche du Japonais s'écrase sans conteste avant que Aran ne sorte, et il remporte cette confrontation, gardant l'espoir d'un kachi-koshi miraculeux en fin de basho. Tokusegawa ne se pose aucune question existentielle face au retours Aminishiki, et celui-ci ne sortant pas de truc de sa boîte à malice, il ne fait pas le poids dans la lutte en force face à l'étonnant Mongol. Tokusegawa n'est plus très loin d'une très réaliste possible place de komusubi. Tochinoshin est lui totalement à côté sur ce basho, et ce n'est pas son combat contre Toyonoshima, au cours duquel le Tom'Pouce de la makuuchi profite d'une position naïvement trop avancée du Géorgien pour l'attirer au sol, qui contredira cette impression. Autre Géorgien à la dérive, Kokkai paraît très amaigri (peut-être un diabète) et manque singulièrement de puissance, en oshi comme en yori. C'est au mawashi qu'il fait aujourd'hui figure de victime facile pour Kyokutenho, qui le sort avec aise, lors même que le Mongol n'est pas particulièrement à son aise en ce mois de janvier. Le dernier citoyen des montagnes du Caucase, Gagamaru, se relance lui aujourd'hui en revanche, face à Shimotori complètement à l'ouest ce tournoi, et possible relégable s'il poursuit sur cette voie en fin de tournoi. Sumo simple et efficace pour Homasho qui expulse Takekaze en cinq secondes après avoir passé son bras sous l'aisselle de son adversaire. Ça sent doucement la fin pour Miyabiyama, dont les poussées ne revêtent décidément plus aucune efficacité, et qui n'a même plus assez de puissance pour bouger Asasekiryu sur lequel il possède normalement un différentiel notable. Le Mongol, un temps en situation périlleuse, en profite pour se retirer au moment opportun et laisser la loi de la gravité, cruelle pour Miyabiyama, faire son œuvre. Beau courage de Tosayutaka qui encaisse sans broncher quinze secondes de puissants tsuppari et nodowa de Koryu, trop peu précis cependant pour être décisifs. Au terme d'un nodowa relâché par son adversaire, Tosayutaka parvient enfin à mettre la main sur le mawashi, et l'emporte sans coup férir. Trois poussées, elles précises, de Wakakoyu suffisent pour contraindre Tokitenku à la sortie. Grand spectacle pour le combat entre Takamisakari et Toyozakura, ce dernier ouvrant (chose habituelle lorsqu'il est en danger) par une henka, encore ratée. Au terme d'un échange vif et violent, Toyozakura parvient à passer dans le dos de son adversaire, mais Robocop est suffisamment vif, et son mawashi pas maîtrisé par Toyozakura, ce qui lui permet de faire dos à l'adversaire un mouvement d'évitement finalement vainqueur. Uchiromotare, un kimarite que Takamisakari est le seul à avoir placé par deux fois.
Enfin, Hakuba sort vainqueur d'un combat sans placer de henka, en amortissant les deux bras en avant la charge de Kimurayama avant de placer ses mains sur le mawashi et de faire montre d'une belle puissance pour un net yorikiri.
En juryo, Kasugao, déjà assuré de son retour en makuuchi, enchaîne les succès et n'est plus suivi que par son compatriote coréen Tochinowaka, Hoshikaze ayant échoué aujourd'hui. Masunoyama, un temps blessé, décroche un méritoire kachi-koshi, tout comme Masatsukasa.
Toutes les vidéos de cette journée ici: http://www.lesumo.fr