C’est à cela que peut se résumer la lutte au sommet en ce Kyushu basho 2010 à Fukuoka, même si force est d’ajouter également que deux autres rikishi, plus un troisième tout théorique, restent encore en course pour remporter la couronne.
On attendait un combat au sommet pour ce basho, et s’il avait fallu faire des pronostiques avant la tenue de ce basho, on aurait sans doute eu une bonne cote pour le combat Hakuho-Baruto qui aura lieu demain. Qui aurait pu deviner iol y a quinze jours que le combat revêtant sans doute le plus d’enjeux serait le Hakuho-Kaio de ce jour ? De l’aveu même de l’ozeki vétéran, il ne s’attendait pas lui-même l’an dernier à revenir encore une fois comme rikishi dans sa ville natale, mais plus sûrement comme oyakata. Beaucoup l’ont enterré – dont moi – au vu de ses successives performances douteuses pour son grade, et de ses kachi-koshi bien souvent arrachés de haute lutte avec l’aide précieuse de certains camarades ozeki. Mais depuis douze jours, Kaio bluffe tout le monde. Ayant chuté dès le shonochi, il semblait confirmer les craintes que ce basho ne soit qu’un baroud d’honneur avant son départ. C’est sans doute bien un baroud d’honneur, mais de départ il n’est plus question. Il est question de yusho lorsque Kaio gravit le dohyo lors du musubi-no-ichiban. Mais en face il y a Hakuho, yokozuna historique bien décidé à faire rentrer les choses dans l’ordre, c’est à dire conserver la tête jusqu’à l’issue du dernier sombat du senshuraku. Hakuho, visiblement peu enclin à concéder une prise de mawashi à Kaio, en concède pourtant une après les échanges de coup post-atari, et main droite s’il vous plaît. Mais le Mongol stabilise le combat, épuisant les réserves d’énergie du vétéran avant de placer une charge rageuse imparable. Ils ne sont désormais plus que deux en tête.
Mais deux tout de même car Toyonoshima continue son petit (joke) bonhomme de chemin, cette fois-ci de manière plus nette que la veille face à Baruto, en repoussant puissamment Kakuryu qui ne peut esquisser la moindre offensive sur ce combat. S’il était attendu que Toyonoshima fasse un bon parcours en milieu des rangs hiramaku, lui dont la place est en sanyaku régulièrement, la concentration dont il fait preuve depuis le départ pour ne pas concéder de défaites évitables à l’égard de Goeido, dans une situation similaire, est tout à fait admirable. Toyonoshima affrontera Kaio demain, avec le secret espoir que Baruto créée la surprise face à Hakuho.
Baruto est encore présent au contact, car le premier choc entre ozeki aboutit à la victoire somme toute logique du Balte, face à un Kotooshu bien démotivé, qui cède – seule surprise véritable de ce combat - sur un uwatenage du pourtant peu technique Estonien.
Derrière, c’est Goeido qui reste seul au contact théorique avec le groupe des quatre furieux. Combat sérieux avec une prise de mawashi plus ferme face à Tokusegawa, auteur d’un bon tournoi. Goeido affiche deux chiffres à son compteur de victoires désormais. Kisenosato et Tamawashi enchaînent avec un neuvième succès aujourd’hui. Plus de grinta chez Tamawashi que chez Takekaze, dépassé par la charge en oshi de son adversaire. Aminishiki mystifié par Kisenosato sur un hatakikomi juste après l’atari, la chose est assez rare pour être notée. Aminishiki était dans un mode « charge de mule » aujourd’hui, il a trouvé plus finaud que lui.
Ils sont trois à remporter le kachi-koshi aujourd’hui. Prise intérieure pour Kotoshogiku et Asasekiryu l’un sur l’autre, et sans surprise dans cette situation c’est Kotoshogiku qui enclenche les gaburi et l’emporte sans trembler. Gros courage de Tosayutaka qui encaisse pendant trente seconde la pluie de tsuppari de Miyabiyama puis sa tentative de projection après un morozachi pour le sortir d’épuisement en yori. Encaissant le nodowa d’Okinoumi, Tokitenku décroche ensuite un très profond morozachi qui lui permet de disposer en tsuridashi de son adversaire, chose rare pour ce brillant technicien.
Pas de henka pour les deux spécialistes Aran et Hakuba, qui décrochent tous deux une solide prise de mawashi. A ce petit jeu, la puissance d’Aran finit par parler et Hakuba se rendre à la raison. Tochiozan, déception du basho, rame pour disposer de Yoshikaze, vaincu au final après un combat acharné sur yorikiri. Combat de lutteurs dépassés sur ce basho entre Kitataiki et Tochinoshin, le Géorgien l’emportant après un pas de côté grâce à sa solide prise extérieure main gauche. Wakanosato est en contrôle de tout son combat face à Homasho, qui résiste tant est plus en pliant à la tawara, avant que Wakanosato ne déclenche une très violente projection. Après une lutte psychologique intense, Kokkai se lance dans un assaut furieux mais comme d’habitude déséquilibré, ce dont profite Takamisakari qui en profite pour le pousser à terre. Pris à son piège du hatakikomi, Mokonami chute lourdement lorsque Kotokasuga libère le passage après quelques poussées. L’affrontement entre Kimurayama et Bushuyama n’est pas un parangon de vivacité, les tsuppari et les nodowa se succédant à un rythme pas si soutenu, avant que Bushuyama ne place un assaut vainqueur. Henka de Shimotori sur Shotenro qui fait tournoyer ensuite son adversaire et l’accule à la tawara avant la poussée finale. Kyokutenho est rapidement dépassé par Koryu qui après un tachiai puissant décroche une imparable prise intérieure. Sortie simple, puissante et efficace pour Gagamaru qui fait parler la conséquente différence de poids avec Sokokurai. Pauvre, pauvre Kasugao qui ne paraît pas dans son assiette pour céder en contre de projection face à Tochinonada.
Parallèle sympathique, en juryo également le nombre des leaders passe de trois à deux unités. Wakakoyu fait ce qu’il sait faire le mieux face à Takarafuji : une série ininterrompue de tsuppari pas sans rappeler le Toki des grands jours, puis, lorsque la lutte en vient au mawashi, un bref tirage pour déséquilibrer l’adversaire et remporter un succès précieux dans la course au juryo yusho. De son côté, Toyohibiki est bien trop puissant pour Tamaasuka qu’il agonise de nodowa avant de le sortir en yorikiri. Il garde la maîtrise de son destin quant au juryo yusho. Derrière eux, on retrouve quatre rikishi : Kaisei et Sakaizawa enlèvent leurs combats de haute lutte en yori pour rester en course, le premier face à Tochinowaka alors en tête. Takayasu complète le quatuor après un okuridashi sur Hochiyama.
Kyokunankai arrache son kachi-koshi en venant à bout d’Akiseyama au terme d’un long affrontement très physique. Le décalage sur le côté gauche d’Asofuji se révèle insuffisant pour tromper la vigilance de Daido, qui passe ensuite sa puissance pour une sortie brutale. Après les tsuppari de l’atari, Sadanoumi décroche une profonde prise de mawashi qui lui donne une nette victoire sur Wakatenro. En déficit de poids, Hoshikaze parvient pourtant à trouver les ressources physiques pour tenter des yori sur Ryuho, mais se ravise devant leur inefficacité et place un crochetage malin qui lui donne la victoire. Sotogake pour le Mongol de l’Oguruma. Belle puissance de Sadanofuji qui dispose en oshi de Kakizoe peu à son aise. Pas assez méfiant, Tamanoshima se laisse berner par un hikiotoshi vicieux du renard Toyozakura. Tamanoshima abandonne toute prétention au yusho. Victoire piteuse de Jumonji en appui sur le cou de Shironoryu. Ce succès ne changera toutefois rien au destin du vétéran, promis à la makushita.
En makushita, c’est Shirononami qui est victime de Takageppo monté de sandanme. Ryuonami est make-koshi, Kyokushuho kachi-koshi. Tochitsubasa ayant perdu son combat du jour face à Minami, qui s’octroie par là même la possibilité de briguer la montée en juryo, on va avoir droit à un gros tomoe-sen dimanche. Outre les deux rikishi précédemment cités, on y retrouvera Naoe, vainqueur du toujours solide Kagamio, le surprenant Kumagai, Chiyonokuni, qui a disposé de l’espoir Yamashita, et Myogiryu, vainqueur d’un Futeno enfin remis, apparemment. Yoshiazuma et Nionoumi, bien placés pour la montée, seront sans doute opposés à des juryo demain et restent eux aussi en course pour le dernier jour. Dans cette lutte pour la montée, Sagatsukasa cède en juryo face à Tsurugidake qui joue sa peau, et Kyoseumi gagne sa repromotion en plongeant Chiyohakuho dans le doute.
En sandanme, c’est Aozora qui surprend son monde en disposant de Chiyootori. Ancien makushita 8, il a toutefois des références sérieuses. Il affrontera Wakakengo, de retour d’un basho manqué qui lui a donné une adversité moins relevée. Takageppo finit à six victoires, Tochitenko est make-koshi et se rapproche dangereusement de la division jonidan qu’il n’a plus connue depuis 1984.
Surprise en jonidan, où il n’y aura pas de kettei-sen, chose rare dans cette division la plus peuplée de l’Ozumo. C’est Fujita, ancien sandanme de retour de blessure, qui emporte sa septième shiroboshi sur Kitagawa et profite du revers concédé par Hoshigane pour décrocher son premier titre.
En jonokuchi, c’est comme prévu Hokutokuni qui enlève le yusho. On voit mal d’ailleurs ce qui pourrait l’empêcher d’enchaîner en jonidan en janvier prochain. Kasachikara décroche un nouveau et énième make-koshi, ce vétéran mérite le respect par sa résilience. Le shindeshi U emporte un cinquième succès.
Toutes les vidéos de cette journée ici: http://www.lesumo.fr