Le colosse vacille, tombe, mais ne cède pas.
Le yokozuna Hakuho, installé en tête jusqu'ici sans réelle mise en danger, a vu aujourd'hui sa suprématie contestée par son compatriote, le M3o Tokitenku. Après un puissant tachi-ai, la lutte pour le mawashi s'organise. Chacun tient le mawashi de son adversaire d'une main. Tokitenku tente soudain un sashikae (changement de position d'une main pour saisir le mawashi à l'intérieur), que contre habilement le yokozuna en libérant sa main gauche et en se décalant à côté de lui pour placer un de ses célèbres uwate main droite ravageurs. Mais son aite résiste et se remet face à lui. Il s'ensuit une lutte rapide pour reprendre le mawashi à l'intérieur, remportée à nouveau par Tokitenku. Rebelote, Hakuho réagit de la même façon, il libère sa main droite, cette fois, et place un uwate main gauche qui envoie les deux hommes valdinguer au pied du shimpan. Si Tokitenku, sans doute pour amortir sa chute (ce qui ne l'a pas empêché de se casser une dent), n'avait pas eu le réflexe de poser la main sur le dohyo, derrière la tawara, la face du basho eût peut-être été changée.
Pour une main de trop...
Il est prenable, le yokozuna. Qu'on se le dise !
Et ce n'est pas Kakuryu qui dira le contraire, lui qui a mené un combat exemplaire contre l'ozeki bulgare Kotooshu, stoppant brutalement sa série de victoires et le reléguant dans un rôle secondaire. Sans doute méfiant de la malice du jeune Mongol, voire timoré, Kotooshu n'oppose à la pugnacité de son adversaire qu'un tachi-ai de mollusque, et reste passif, trop passif face au fighting spirit et à la créativité du jeune premier de l'Izutsu beya. Celui-ci maintient intelligemment les bras de Kotooshu très haut, l'élève encore, puis lui assène un magnifique et imparable sukuinage. Le géant bulgare vient de perdre la tête du classement, en perdant la tête tout court. Il ne peut s'en prendre qu'à lui-même.
L'ozeki Kaio, lui, habitué pourtant au reculoir vu ses douleurs récurrentes au bas du dos, a dû s'employer ferme pour se débarrasser d'un Kyokutenho toujours si dangereux qu'on peut se demander s'il n'a pas bu la potion de l'éternelle jeunesse. Mais Kaio n'a pas failli. Il a avancé et a repoussé de sa force légendaire le gentleman mongol de l'Oshima beya, qui a pourtant tout tenté pour dévier le puissant yorikiri de son adversaire.
Baruto continue à nous étonner. Jusqu'ici, dans ce basho, c'était plutôt négativement. On se demandait les raisons de sa méforme relative en cette première semaine. Là, face à Kitataiki, il nous a tout simplement bluffés en inventant une nouvelle technique : l'oshidashi du popotin. Après un tachi-ai plutôt défensif, l'ozeki a saisi comme souvent, vu sa grande taille, le mawashi de son aite par en-dessus, s'offrant ainsi la possibilité de le soulever juste par la force colossale de ses bras et de le sortir en tsuridashi. Mais Kitataiki ne l'entendait pas de cette oreille. Ni même des deux. Il s'est mis à gigoter vigoureusement puis, une fois lâché, a réussi à esquiver plusieurs poussées en fuyant le long de la tawara, mais Baruto, d'un petit coup de fesses vengeur, a mis fin à son funambulisme désespéré.
L'ozeki Harumafuji était opposé, une fois n'est pas coutume, à un lutteur plus léger que lui : son compatriote, le shin-komusubi Hakuba. Celui-ci avait probablement dans l'idée de se décaler au tachi-ai, mais le heyagashira de l'Isegahama beya ne lui en a pas laissé le temps. En fait, il n'a eu le temps de rien faire, Hakuba. Ce n'est pourtant pas faute d'avoir tenté des choses, mais l'ozeki, n'ayant pas encore montré jusqu'ici un sumo digne de son rang, était pressé d'en finir et de repartir d'un bon pied pour cette deuxième semaine. Hakuba apprendra, cependant, car il a beaucoup des qualités de son aîné (aîné en expérience, si ce n'est en âge) : la vivacité, l'inventivité, la technique. Il ne lui manque que le poids, la puissance, et l'expérience du haut niveau.
Le komusubi Tochinoshin était opposé au sekiwake Kotoshogiku. Que de puissance dans les jambes chez ces deux lutteurs ! Le Géorgien, moins expérimenté que son adversaire, s'est pourtant montré le plus malin sur le dohyo. Voyant qu'il ne pouvait le sortir en force, il a réussi à déséquilibrer le Sadogatake boy et à lui infliger un cuisant uwatenage.
L'autre sekiwake, Kisenosato, a dû sortir le grand jeu et montrer un bon sens de l'équilibre sur la tawara pour se défaire d'un Tochiozan décidément en grande forme et lui faire mordre la poussière.
Belle victoire à l'arraché d'Aminishiki sur l'ancien sekiwake Wakanosato. Le second couteau de l'Isegahama beya a tout de suite reculé devant la puissante poussée de Wakanosato. Un instant, on a cru que son genou blessé allait céder, mais il s'est repris, et, continuant à reculer, a réussi à faire chuter avant lui son vieux camarade d'un acrobatique uwatenage.
Rien ne va plus pour le heya-gashira de la Takasago beya. On avait pensé que depuis le départ de son illustre aîné, Asasekiryu se sentait investi d'une force nouvelle. Mais elle n'aura duré que deux basho. Il vient d'obtenir face à Aran, qu'il dominait pourtant en confrontations, son zensho make-koshi. Sa blessure récurrente au genou le gène-t-elle ? On ne le sait pas encore, mais on voit bien qu'il est à la dérive. Espérons qu'il saura se ressaisir en deuxième semaine.
A noter encore le premier kachi-koshi du jour, celui de Homasho (8-0) qui partage la tête pour l'instant avec Kakuryu et le yokozuna, et qui accomplit pour l'instant un tournoi exemplaire. Evidemment, à ce niveau, il ne rencontre pas la crème de la crème. Mais s'il continue comme ça, les torikumi makers sauront bien lui trouver des adversaires capables de lui barrer la route.
En juryo, le leader solitaire Masatsukasa, a dû s'incliner aujourd'hui devant la pugnacité féroce d'Asofuji. Il reste toutefois seul en tête, mais son vainqueur du jour ainsi que Kasugao, tous deux à 6-2, sont sur ses talons. Quelques lutteurs encore se tiennent en embuscade, prêts à bondir à la moindre défaillance : Kotokasuga, Hochiyama, Kaisei et Toyozakura, tous à 5-3.
Toutes les vidéos de cette journée ici: http://www.lesumo.fr
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