« Mauvais sort à Tokyo ? »
C’est la question que l’on pourrait se poser légitimement au sujet du yokozuna Hakuho, suite à cette douzième journée du Hatsu basho. Car le yokozuna, qui a l’an dernier perdu les trois kettei-sen qu’il a été amené à disputer au Kokugikan (un record en soi), a quitté la tête du tournoi aujourd’hui, en concédant un revers face à l’ozeki Harumafuji, très inspiré sur ce combat. L’ozeki, qui charge tête la première, repousse son adversaire, qui se prépare alors à lancer une deuxième offensive, alors qu’il se trouve à distance de l’ozeki. Mais alors qu’il se lance, Harumafuji s’écarte sur son côté gauche au dernier moment et à une telle vitesse que Hakuho ne peut l’anticiper, et se retrouve bien vite avec le grêlé Mongol dans son dos. Ce dernier n’a plus qu’à raccompagner le yokozuna vers la sortie.
Coquin de sort pour Hakuho, piégé habilement par Harumafuji.
Victoire nettement plus tranquille pour Asashoryu.
Suite à ce combat se dispute le musubi-no-ichiban, dernier combat du jour, que le yokozuna Asashoryu, pressé de convertir cet avantage, remporte sans coup férir sur Kaio grâce à une bonne prise de mawashi qui lui permet d’amener l’ozeki au corps-à-corps tout en lui déniant une prise de sa fameuse poigne droite.
Restent (virtuellement) au contact des leaders Harumafuji donc, qui passe comme on va le voir devant Kotooshu (importance de prestige surtout). Le pas de côté du Goeido ne suffit pas à surprendre Baruto, qui contient avec calme son adversaire avant de prendre son « spécial », cette très profonde prise sur l’arrière du mawashi de son adversaire (de la main gauche cette fois) et d’exercer sa phénoménale puissance pour le sortir à la tawara en yorikiri.
Baruto engrange des victoires qui seront précieuses peut-être dans deux ou quatre mois. Aminishiki met rapidement à terre Kitataiki, dont la charge bien molle n’inquiète pas le vétéran. Combat superbe enfin entre Aran et Toyohibiki, avec plusieurs tentatives de projection sur le bord de la tawara, Aran prenant le meilleur sur Toyohibiki mais sortant son pied par inadvertance lors même que le combat était gagné pour lui sur un retournement joliment exécuté. Le Russe n’est pas payé de ses efforts et de son sumo de qualité.
Derrière, la moitié des (vains) poursuivants des yokozuna décroche. C’est tout d’abord le cas de Kotooshu, encore une fois piégé par un rikishi de poche. Puisque Toyonoshima n’y est cette fois pas parvenu, c’est Takekaze, bien remis de son choc dans le mur mongol hier. Tirages et poussées bien alternés suffisent à celui-ci pour rompre l’équilibre du grand Bulgare, qui aura bien du mal à tenir son rang en cette fin de basho. Wakanosato décroche le kachi-koshi en puissance aux dépens de Tosayutaka, avec une main gauche à l’intérieur qui lui permet au final de projeter son adversaire au sol en sukuinage. On a vu pour Aran, donc. Enfin, une solide prise de mawashi pour Kyokutenho, qui ensuite n’a plus qu’a appliquer la technique Kotoshogiku des petits bonds de kangourou pour disposer de Hakuba qui plafonne.
Kotooshu a décidément bien du souci avec les rikishi-miniature…
Pour le reste des combats, Shimotori décroche en okuritaoshi (poussée de l’arrière) sa troisième victoire de suite et se donne un peu d’air dans la perspective d’un maintien en division reine. Bataille de chiffonniers entre Takamisakari et Koryu, les deux hommes terminant dans une position peu orthodoxe dans un combat du haut du corps, Takamisakari en position de kimedashi avant de passer les bras en dessous de son adversaire. Tentatives de kubinage de Robocop, mais celui-ci glisse au moment de la poussée finale et concède le combat à Koryu. Homasho se débarrasse de Mokonami, pourtant sur quatre victoires consécutives, sur un oshidashi clair après avoir résisté aux poussées-tirages du Mongol. Trop bas après le tachiai, Kokkai se fait logiquement aspirer à terre par Tamanoshima, opportuniste, et concède le make-koshi. Shotenro confond vitesse et précipitation, une erreur fatale face à un vieux guerrier comme Tochinonada, qui le laisse chuter en accompagnant sa chute d’un katasukashi. Iwakiyama est décidément en feu, décrochant avec un septième succès consécutif son kachi-koshi, face à Asasekiryu pourtant très décidé, qui lui-même se retrouve dans une situation périlleuse. Un morozachi rapidement décroché permet à Tochiozan de battre sans douleur un Bushuyama bien dépassé encore une fois.
Tochiozan jouera le kachi-koshi demain. Henka magistrale de Kakizoe après un matta tactique, conclue d’une poussée d’une main. Sumo puissant de Kisenosato, à nouveau sur les bons rails, qui dispose de Tamawashi en oshi-zumo. Mae-mitsu (avant du mawashi) puis morozachi pour Toyonoshima qui aggrave la note pour Tochinoshin, décidément pas au mieux avec son épaule blessée. Il reviendra à n’en pas douter. Kotoshogiku l’emporte sur kotenage, une technique assez peu fréquente pour lui. Kakuryu ploie au départ sous la charge de Miyabiyama, avant de crocheter son mawashi et de le repousser avec facilité.
En juryo, on est habitués au suspense et aux retournements de situation, et cette journée n’échappe pas à la règle. Gagamaru, mal positionné au tachiai et trop lent, se fait surprendre par le tirage de Wakakoyu qui remporte un succès précieux, et relance par la même occasion la lutte au yusho. Le Géorgien voit revenir à ses côtés Sakaizawa.
Tosanoumi repousse pourtant celui-ci avec énergie à la tawara, mais Sakaizawa enserre l’épaule et le cou de son adversaire pour le sortir en kubinage. Défaite douloureuse pour le vieux lion, Sakaizawa se donnera enfin un peu d’air dans cette division juryo où il rame depuis sa blessure.
Derrière ces deux hommes, Kyokunankai manque l’opportunité de jouer au troisième larron, en se retrouvant face à Kasugao, décidément de retour en mode Uwatenage, qui pour la deuxième fois de suite cette technique, cette fois au terme d’un combat maîtrisé sans souci face à Kyokunankai. Aux côtés de celui-ci, on retrouve Sokokurai, qui décroche le kachi-koshi au terme d’un combat enlevé et plein de maîtrise technique, en oshi puis en yotsu, face au pourtant très expérimenté Toyozakura. Un très beau basho pour le shin-juryo. Kyoseumi est un habitué des henka dès qu’un combat revêt un enjeu. Mais l’effet de surprise est gâché par le rappel du gyoji, et Kyoseumi doit alors combattre Okinoumi, qui s’adapte très bien aux tirages du poids lourd et le sort au final en yorikiri. Okinoumi est cette fois vraiment adapté aux rangs salariés et montre un sumo de grande qualité sur ce basho, ce qui lui vaut son kachi-koshi dès cette douzième journée.
Une position plus basse suite au tachiai permet à Shirononami de soulever Hoshikaze par un yorikiri quasiment assimilable à un tsuridashi. Hoshikaze est en situation délicate et doit trouver deux succès supplémentaires d’ici dimanche. Victoire sans trembler pour Kasuganishiki qui passe dans le dos de Chiyohakuho et achève le travail en okuridashi. Les deux hommes connaissent un sort identique et devront batailler ferme pour éviter le make-koshi. Dominé nettement en puissance par Asofuji qui lui rend pourtant pas mal de centimètres, Jumonji n’est pas rassurant et n’est pas encore sauvé en juryo. Léger décalage au tachiai qui permet à Kaiho de prendre le contrôle des opérations et d’infliger une nouvelle défaite à Wakatenro en déviant son assaut et en le laissant choir à terre. Kaiho est vieux, mais il n’est pas mort. Futeno subit tout le combat face à Tamaasuka avant de contrer le hidari-yotsu de son adversaire et de le sortir du cercle. Futeno n’est pas rassurant, mais au moins limite-t-il les dégâts. Tamaasuka est lui make-koshi. Mauvaise inspiration de Kimurayama qui laisse Yamamotoyama l’affronter en frontal. La messe est dite en deux poussées du poids (méga) lourd. Kirinowaka est tout simplement trop faible face à Kotokasuga qui le balade en yotsu-zumo avant de conclure le combat sur de puissantes poussées en oshi. Dominé en puissance, Tokusegawa devra encore engranger une victoire avant de devenir le treizième Mongol en makuuchi (le quart de la division). Il cède sous les charges de fils spirituel de Kitazakura et Mitoizumi (en termes de lancer de sel), Masatsukasa, qui décroche lui le précieux kachi-koshi.
Le programme de fin pour la lutte au makushita yusho étant déjà joué, et les combats majeurs de montée en juryo étant à venir, ce sont des luttes de progression qui se jouent aujourd’hui. Belle opération de Hakiai face à Dewaotori, et de Takarafuji face à Takayasu qui fait pourtant un beau basho. Kitazakura concède un cinquième revers et s’enfonce toujours plus loin. Kachi-koshi d’Amuru, de Kamei, Daishoyama, Yotsuguruma et du solide Mongol Kagamio. Le vétéran Kimenryu sauve pour l’heure sa tête en makushita. Nakano enfonce encore un peu plus l’ancien sekitori Dairaido, qui ne reverra pas les rangs salariés avant de longs mois. Yoshiazuma est bien trop grand et puissant pour Wakaryusei qu’il sort sans coup férir sur yorikiri. Aoki se met en difficultés tout seul en concédant à Matsutani une prise de mawashi avantageuse, que celui-ci transforme en uwatenage. Aoki est vaincu pour la première fois à deux reprises dans un basho depuis ses débuts professionnels. Dominé à l’impact par Kotoyutaka, Takateru devra attendre encore pour décrocher le kachi-koshi. Les choses deviennent très sérieuses pour l’ancien tsukedashi. Dépassé à l’atari, Takanoyama parvient à se récupérer à la tawara, pour une petite minute de confrontation. Le Tchèque de la Naruto-beya parvient ensuite à délivrer sa magie habituelle et conclut ses tentatives de crochetage par un tournoyant shitatenage. Takanoyama n’est pas encore mort et jouera le kachi-koshi en fin de basho.
En sandanme, à 43 ans et 168 basho disputés (record absolu), Tochitenko s’affirme comme le grand favori de la division, et se voit rejoint par Sadanishiki, de plus de vingt ans son cadet. Cinquième succès pour Maeta et Kazafuzan, qui vont effectuer de belles progressions. Masutoo obtient le kachi-koshi et reviendra en makushita. Aisaka plafonne et concède un deuxième revers, Dewanosato n’est pas encore mort, Ryutei est lui au plus mal, Amatsu subit un sort comparable à Aisaka, tout comme le jeune Honda.
En jonidan, la logique est également respectée. Karatsuumi se débarrasse de Tosahayato, et dans le choc des revenants, Terashita, qui paraît complètement remis et reste sur treize succès consécutifs, (dont douze sur yorikiri) dispose du Mongol Sensho. On s’achemine vers une nouvelle confrontation entre Terashita et Karatsuumi, si le premier parvient à se sortir de l’affrontement qui l’attend sans doute avec un invaincu de sandanme (peut-être Tochitenko).
Comme la logique l’imposait, c’est le sandanme de retour de blessure au plus bas niveau, Kozan, qui s’impose dans la confrontation des invaincus de jonokuchi. Il devra rester invaincu s’il ne souhaite pas voir l’un ou l’autre de ses quatre poursuivants le remonter et lui disputer le titre en kettei-sen.
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