C’est le sentiment qu’on peut avoir en contemplant le sumo proposé actuellement par le yokozuna Asashoryu. Dépassé depuis six mois par son cadet mongol Hakuho, le dai-yokozuna semble vouloir prouver à tout le monde qu’il est là et bien là, qu’il va falloir encore compter sur lui et que l’intai n’est pas pour demain. Confronté à Kisenosato qui reste l’un des lutteurs les plus dangereux du plateau, Asashoryu domine son combat, comme souvent sur cet Aki basho, par la faveur d’un tachiai éclair, qui lui permet de passer sous la garde de son adversaire. A partir de cette position, il n’a plus qu’à faire parler la puissance de ses cuisses et de ses hanches (les fameux « achi-koshi », base essentielle du sumo) pour sortir imparablement Kisenosato, en l’accompagnant de sa désormais habituelle poussée finale, moins prononcée qu’hier face à Chiyotaikai toutefois. Si Asashoryu n’a pas encore le yusho en poche, il faudra être solide pour aller le chercher.
D’autant que son adversaire numéro un, Hakuho, ne donne pas toutes les garanties de sérénité. Dominé au début de son combat par Kakuryu qui tente crânement sa chance en lui déniant toute possibilité de prise de mawashi, le yokozuna ne doit son salut qu’à la précipitation de son cadet qui ne peut finir le travail. Hakuho n’a plus qu’à reprendre acrobatiquement le bras de son adversaire pour le sortir en tottari. Hakuho s’en tire d’autant mieux aujourd’hui que les deux ozeki de la Sadogatake-beya, qui l’accompagnaient à une longueur d’Asashoryu, chutent ce jour. Kotomitsuki tout d’abord, dominé par Harumafuji auteur d’excellents choix tactiques, en provoquant la lutte à distance avant de profiter d’une ouverture pour placer un imparable morozachi et conclure sur yorikiri. Kotooshu ensuite, qui lui tombe victime d’un décalage habile de Kaio au tachiai, qui permet au vétéran d’accrocher une prise en kotenage que Kotooshu accompagne plutôt que de perdre son bras. Au final, oshidashi pour Kaio qui n’a plus qu’un combat à gagner pour décrocher le kachi-koshi. Plus que dix victoires pour être le titulaire du plus grand nombre de victoires en makuuchi Chiyotaikai, le dernier ozeki, est lui plus que jamais à la peine, dominé en puissance et sans coup férir par un Tamanoshima pourtant pas à la fête.
Au côtés des deux Kotozeki, on retrouve Baruto de retour à son niveau de sanyaku, qui dispose aisément de Tochinoshin qui lui subit la loi des shin-joi. Le Géorgien n’est cependant pas ridicule sur ce basho et devrait prochainement capitaliser sur cette expérience. On retrouve aussi Hokutoriki, qu’on n’avait pas vu à telle fête depuis bien longtemps.
Parmi les perdants de ce basho, Miyabiyama, bien pâle, qui ne peut même pas prfiter des erreurs de ses adversaires. Un make-koshi logique et un retour vers un milieu de banzuke qui lui sied mieux désormais. Shotenro et Tochinoshin donc, pour qui ce basho fait office de « kawaigari » grandeur nature… Tamaasuka n’est pas au mieux non plus, comme Kyokutenho présent dans une zone dangereuse du banzuke, et vaincu aujourd’hui par un Goeido inconstant sur ce basho. Takamisakari prend Tokitenku remonté comme un Shinkansen en pleine face, Takekaze sort vainqueur du combat de nains face à Toyonoshima, et Homasho est logiquement vaincu par sa nemesis Tochiozan (huit combats, huit victoires pour ce dernier).
Le bas de tableau de makuuchi nous offre parfois des purs moments de bonheur, et c’est ainsi que je qualifierais le Asasekiryu-Shimotori, presque une minute d’intense confrontation remportée par Shimotori qui inflige le make-koshi au dragon rouge. Aran est de retour dans de meilleures dispositions qu’hier, et vainc Tochinonada dont la place en makuuchi au prochain tournoi n’est pas assurée. La montée contrariée de Wakanosato au dernier banzuke lui permet de jouir d’un torikumi plus favorable, ce dont il profite en étant déjà proche du kachi-koshi. Enfin, après un départ à 5-0, Masatsukasa vient d’enchaîner un 1-4 sur les combats suivants. Il est dépassé aujourd’hui par Bushuyama, brutal et efficace.
Plus tôt dans l’après-midi, dès le premier combat en juryo, les enjeux sont importants puisque Okinoumi et Toyozakura partagent alors la tête du basho et peuvent espérer le kachi-koshi. Vif et très déterminé, Toyozakura submerge son adversaire et le sort en oshidashi sans coup férir. Battu par Hoshihikari, Hoshikaze est l’un des rares lutteurs en danger de cette division juryo très homogène ce basho. Tokushinho et Kyokunankai sont aussi sur la sellette, même si ce dernier semble bien se remettre de sa blessure contractée en cours de basho. Kaiho, roublard, fait tourner Tokusegawa en bourrique autour du cercle avant de le sortir. Dans le haut du tableau, un Tamawashi volontaire sort son adversaire d’un yorikiri puissant. L’adversaire en question étant le gigantesque Yamamotoyama, l’exploit est d’autant plus notable. Tamawashi assure du coup sa promotion en makuuchi et se retrouve serein pour jouer le yusho.
Comme prévu, les deux shindeshi gaijin l’emportent encore aujourd’hui sur leur faible opposition en jonokuchi. On ne voit pas vraiment ce qui va pouvoir empêcher Aoiyama d’empocher le premier yusho de sa jeune carrière. C’est Shobimaru qui devra affronter le Bulgare dans deux jours. Sakuma perd, mais là aussi c’était prévisible…
La sélection se poursuit en jonidan, où les deux favoris Aisaka et Okinoshita passent encore ce tour. S’ils n’ont pas à se rencontrer avant, ces deux-là se dirigent vers un kettei-sen difficile à pronostiquer (même si je mettrais bien ma pièce sur le premier). Trois autres lutteurs seront sur leur route, Hokazan, Ikedo et Komatensho.
Les leaders du yusho ont combattu hier, peu d’enjeux majeurs en sandanme aujourd’hui donc. Ryutei enlève son kachi-koshi, Dewanosato est au bord du gouffre, tout comme les autres vétérans Tochitenko et Kimenryu (malgré la victoire de ce dernier). Takanoiwa subit un deuxième revers, Keno est kachi-koshi.
En makushita, Takarafuji décroche logiquement son kachi-koshi, Kamei bat Homarefuji dans un choc d’espiirs de la division, Maeta et Mankajo sont égaux dans la défaite. Tamarikido bat le triste ancien tsukedashi Hakiai, Satoyama voit peut-être la fin du gouffre. En puissance, Kitazono sort Rikiryu dans un combat d’habitués du haut de la division. Dewaotori, l’ancien J10, domine un Matsumidori qui apprend le haut niveau. Crochetages, puissance, lutte du haut du corps, c’est un long et beau combat que nous offrent Sadanofuji et Ryuden. Plusieurs minutes de lutte avant que Sadanofuji, plus puissant et expérimenté, ne sort son adversaire sous les bravos de la foule. Pourtant bien bas sur ses appuis, Takateru ne parvient pas à contrer la puissance et le gabarit de son opposant Shoktesu. L’ancien tsukedashi et ms1 est quand même de retour en bonne forme, semble-t-il. C’est aussi le cas du lutteur de poche de la Sakaigawa-beya, Satsumahibiki, malgré une défaite étrange concédée à Nakanishi, où les deux lutteurs tombent quasi simultanément à genoux. Enfin, le seul lutteur de makushita à avoir un véritable enjeu dans une division makushita qui voyait hier l’intégralité de ses leaders combattre est aujourd’hui Hoshihikari, opposé à Hoshikaze dans un combat à quitte ou double pour les deux Mongols. A ce jeu, c’est Hoshihikari qui complique la situation de la zone de promotion, où presque tous les lutteurs entre ms1 et ms4 ont encore leur chance…