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toonoryu
07/10/2005, 21h28
Chose promise, chose due, encore un texte extrait de l'excellent SFM, cette fois ci sur un rikishi du passé, Umegatani II. Enjoy !


Rikishi de jadis : Umegatani II



Par Joe Kuroda


Le 20° yokozuna, Umegatani Toutaro II, était un technicien du sumo habile et rusé, même s’il culminait à près de 160 kgs. Son yokozuna dohyo-iri était considéré comme si esthétique qu’il devint la forme de yokozuna dohyo-iri la plus utilisée dans toute l’histoire du sumo. En compagnie de son rival, le yokozuna Hitachiyama, Umegatani inaugura l’âge d’or du sumo, que l’on connaît généralement comme l’ère « Ume-Hitachi », et contribua à élever la popularité du sumo à des niveaux jamais atteint dans toute l’ère Meiji.


De son vrai nom Otojiro, Umegatani grandit dans la préfecture de Toyama où sa famille, réputée dans toute la région, tient une pharmacie prospère. Depuis l’enfance, c’est un gamin costaud, même s’il n’est pas très grand, qui se taille rapidement une réputation de petit prodige du sumo à Toyama. Durant l’été 1890 se tient dans sa ville un jungyo conjoint de l’Ikazuchi et de la Takasago-beya. Otojiro assiste à toutes les séances. L’ozeki Tsurugizan (alors membre de l’Ikazuchi-beya) le remarque alors et en parle à son shisho, Ikazuchi, qui rend immédiatement visite aux parents d’Otojiro, leur proposant qu’il rejoigne l’ozumo.

Son père décline tout d’abord l’offre, peut-être parce que le garçon n’a alors que douze ans, mais Ikazuchi insiste. Finalement, le père d’Otojiro se laisse convaincre après qu’Ikazuchi lui annonce qu’il lui garantit personnellement le bien-être futur du garçon en l’adoptant. Ikazuchi oyakata n’est autre que le 15° yokozuna Umegatani Toutaro I, alors haut responsable de l’Association de Sumo, un homme tellement digne de confiance que quand l’Association décide de construire son premier stade indoor, sa simple caution personnelle suffit à assurer l’ensemble des prêts nécessaires au coût des travaux.

Otojiro, qui s’appelle désormais Oe, suite à son adoption, est encore trop jeune pour entrer en compétition lorsqu’il rejoint l’ozumo. Toutefois, environ à cette époque, Ikazuchi oyakata, conscient du talent brut et de l’habileté naturelle d’Otojiro, décide de lui faire subir ce qui pourrait bien être le premier programme d’entraînement d’élite de l’histoire du sumo, lui affectant un entraîneur personnel et exclusif en la personne du komusubi Onegatani. Non content d’être doté d’un sens et d’une habileté naturelle pour le sumo, Otojiro se révèle en outre un étudiant particulièrement studieux en qui l’on fonde rapidement de grands espoirs.

En mars 1892, Otojiro fait ses débuts sur le dohyo sous le shikona de Umeotani Otomatsu, en jonokuchi. Il est en jonidan en janvier 1894 et atteint les sandanme en mai de la même année. Il lui faut encore un peu de temps pour conforter ses succès initiaux, mais, finalement, il fait ses débuts en makushita en janvier 1896. En tant que rikishi makushita, il devient si populaire au cours des tournées de jungyo qu’on lui demande bien souvent de faire lui-même un dohyo-iri.

Umeotani gravit les rangs élevés rapidement au cours des années suivantes, effectuant ses débuts en juryo en janvier 1897. Deux basho plus tard, en janvier 1898 (à l’époque, il n’y a la plupart du temps que deux basho dans l’année), il atteint les makuuchi, à l’âge de vingt ans. Une fois en makuuchi, Umeotani démontre sa vraie valeur en battant le yokozuna Konishiki lors de son premier basho au sein de la division phare (Konishiki finira par redouter les affrontements avec le natif de Toyama, puisqu’il ne le vaincra jamais en quatre rencontres). Lors du basho suivant, en mai 1898, Umegatani obtient sept victoires pour une défaite et un nul – équivalant à un yusho – et est promu comme komusubi en janvier 1899, puis comme sekiwake en mai de la même année. Il est alors considéré comme le rikishi capable d’emmener l’ozumo vers de nouveaux sommets de popularité mais, en dépit d’un kachi-kochi en tant que sekiwake en mai 1899, il est déchu au rang de komusubi au tournoi de janvier 1900. Il ne laisse pas ce contre-temps altérer son ambition, et s’assure un score suffisant pour assurer sa promotion au rang d’ozeki au basho suivant ; il a alors 22 ans.

Dans l’intervalle, son rival de longue date, Hitachiyama, s’est également forgé sa puissance et fait un nom comme grand espoir du sumo. Hitachiyama a affronté Umeotani pour la première fois en janvier 1895 alors qu’ils étaient encore en sandanme. Hitachiyama l’a emporté. Leur rencontre suivante a lieu en mai 1898. Umeotani dispute alors son second tournoi en makuuchi, alors qu’Hitachiyama est encore en juryo. Et c’est ce dernier qui est déclaré vainqueur. On considère alors que Hitachiyama a un niveau de sanyaku, et leurs rencontres commencent à attirer l’attention non seulement des fans purs et durs de sumo, mais aussi du public en général.

Umegatani et Hitachiyama ont des personnalités, un comportement et un passé radicalement différents, et montrent une grande variété dans leurs styles de sumo respectifs. Tandis qu’Hitachiyama symbolise l’action et la force, Umegatani représente le calme et la souplesse ; leur respect mutuel sert à propulser la popularité du sumo vers des sommets inégalés.

Dans son quatrième basho en tant qu’ozeki, en janvier 1902, Umeotani reçoit le shikona convoité de son shisho et père d’adoption, Ikazuchi oyakata. En mai, il devient officiellement le second Umegatani Toutaro après avoir reçu la permission d’adopter Toutaro comme nom de famille (NB : le shikona « Umegatani » était à l’origine celui du 15° yokozuna et venait du nom de son village d’enfance dans la préfecture de Fukuoka ; Umegatani I n’avait pas la distinction « yokozuna » apposée au-dessus de son nom dans les banzuke de son époque puisque la coutume fut lancée à compter du 16° yokozuna, Nishinoumi).

Tandis qu’Hitachiyama et Umegatani II offrent un sumo de plus en plus compétitifs et passionnant, le nombre de fans croît irrésistiblement lors de leurs apparitions. Umegatani rejoint le niveau d’Hitachiyama tant en technique qu’en puissance, le battant lors des basho de mai 1901 et de janvier 1902, puis, lors du basho de mai 1902, ils doivent s’affronter comme ozeki est et ouest respectivement, avec zéro défaite au compteur. Ce combat crée la sensation et est impatiemment attendu dans tout le Japon. Répondant aux attentes, c’est un moment de légende du sumo, tant offensif que défensif, qui sera raconté par des générations de fans. Le vainqueur en est finalement Hitachiyama. L’héritage des deux hommes, cependant, est solidement établi à partir de cette époque, tout comme la popularité inédite du sumo construite sur les bases de leur rivalité. Après ce basho, Hitachiyama se voit recommander pour l’accession au rang de yokozuna, et il insiste lui-même auprès du comité pour que Umegatani soit promu au grand ultime en même temps. La Kyokai, consciente de la popularité et des capacités des deux ozeki, en convient et demande alors à la Maison de Yoshida Tsukasa de les promouvoir simultanément. Confirmés, tous deux sont élevés à la distinction de yokozuna en juin 1902 – c’est seulement la deuxième fois que deux rikishi sont promus en même temps depuis l’époque de Tanikaze et Onogawa, sous l’ère Edo. En prenant place au sommet de la hiérarchie, Umegatani et Hitachiyama rejoignent le 18° yokozuna Oozutsu dans une période à trois yokozuna.

Même si Umegatani est un rikishi plus lourd, son dohyo-iri est reconnu comme étant le plus élégant et gracieux jamais observé et se trouve être, en fait, celui à l’origine du style « Unryu ». Il excelle au tachiai et une surprenante capacité à anticiper les mouvements de ses adversaires. Se servant de son physique massif, il submerge ses adversaires avec des tsupari et yori, et devient expert dans l’art d’exploiter leurs faiblesses, passant de longues heures à analyser les mouvements de ses adversaires et apprenant leurs techniques de sumo. Son niveau technique s’améliore constamment à travers l’étude et les recherches incessantes. En conséquence, il ne laisse jamais d’opportunités à son adversaire lui permettant de le surclasser. A l’époque de sa promotion comme yokozuna, Umegatani n’est âgé que de 25 ans et trois mois, ce qui fait de lui le plus jeune rikishi à recevoir cette promotion, battant le record de l’ère Edo d’Inazuma et le plus récent de Konishiki – un record qui tiendra jusqu’à ce que Terukuni devienne yokozuna à 23 ans et quatre mois. L’aube de l’ère « Ume-Hitachi » permet non seulement un bond sans précédent dans la popularité du sumo au Japon, mais contribue encore à intégrer un peu plus l’ozumo comme composante essentielle de la société et de la culture nippones. Au cours de chaque basho, chaque quotidien se bat pour rendre compte des évènements sur le dohyo, et la popularité du sport, en même temps qu’une intense campagne de presse, conduisent en juin 1909 à la construction de la première arène permanente du sumo, le premier Kokugikan, événement majeur dans l’histoire de l’ozumo. La longévité dans la puissance d’Umegatani se trouve être également remarquable, puisqu’il tient son rang de yokozuna durant 24 basho sur une période de treize ans. Bien que durant son activité en makuuchi, ses performances face à son rival Hitachiyama soient quelque peu faibles, avec trois victoires pour sept défaites et cinq nuls, Umegatani n’est jamais battu régulièrement par un seul lutteur de niveau sanyaku durant ces années, mais après l’ouverture du Kokugikan, il est très souvent frappé par les maladies et son sumo amène quelques nuls sur son total final.

Après le basho de juin 1915, à l’âge de 37 ans, il décide de prendre sa retraite et de prendre en charge le toshiyori myoseki de son père adoptif, Ikazuchi. Cela dit, prendre sa retraite se révèle plus facile à dire qu’à faire puisque, en raison du grand nombre de rikishi de haut grade de cette ère désireux d’être tachimochi et tsuyuharai, c’est à dire assistants du yokozuna pour son dohyo-iri final, les cérémonie de retraite d’Umegatani se tiennent sur trois jours. Plus tard, en tant que membre de la NSK, Umegatani travaille comme juge arbitre et devient membre de l’exécutif de la Kyokai. Il décède en service commandé pour la NSK, durant un jungyo. Malheureusement, l’ancien yokozuna n’aura jamais été à même de sortir un rikishi prometteur de sa propre heya, et l’Ikazuchi-beya déclinera avec son décès.

Kaiomitsuki
07/10/2005, 22h34
Ah celle-là là je l'attendais.... comme d'ailleurs j'attends avec impatience les prochaines biographies de Yokozuna sur SumoFanMag.....

Petite question pour le "Tenryu Saburo and Shunjuen" il y avait des tableaux
est-il possible de les mettre en ligne !?

Encore merci Toonoryu pour toutes ces traductions :wink:

Simaldeff
08/10/2005, 13h02
Pour des fans fraichement moulut comme moi je trouve c article extremement interessant et utile pour se forger une cultrue sumologique , car à dire vrai les chiffres que l'on trouvre dans les stat. d'archives sont frois et ne montre pas les dohyo-iri, les tachiai et surtout les legendes atenantes au rivalités entre rikishi ...

Merci Toonoryu ... à propos j'aimerais bien savoir à quel moment et pourquoi les basho sont passés de 2 à 3, 4 ... jusqu'a 7 par ans.

Merci encore.

Terarno
08/10/2005, 13h24
"... passant de longues heures à analyser les mouvements de ses adversaires"
Au début du 20ème siècle, je me demande comment il faisait :P Il se cognait tous les entrainements de tout le monde ou il avait un ensemble caméscope/lecteur/graveur chez lui ?

toonoryu
08/10/2005, 14h58
@ Simaldeff : à part des considérations économiques (+ d'argent, cf. F1), je ne vois pas trop...

@ Terarno : bonne question :wink: dont j'ai bien peur de ne pas avoir la réponse... Par contre, je crois me souvenir que le webmestre nous avait proposé des série de dohyo-iri il y a quelques temps... ce serait sympa s'il pouvait nous dégotter celui d'Umegatani II ( si tant est qu'il existe, bien sûr)

Julienishiki
08/10/2005, 15h58
Super article! Et très belle traduction toonoryu :D . Et je suis d'accord avec toi, les dohyo-iris en vidéo c'était très sympa, surtout quand on a jamais eu l'occasion de les voir lorsque les lutteurs étaient en activité.

Terarno
08/10/2005, 16h11
Celui qui me sort une vidéo du Dohyo-iri d'un Yokozuna en 1899, je lui paie l'apéro.

Julienishiki
08/10/2005, 16h24
Oui, ça c'est sûr que ça va être dur :wink: . Mais quelques photos du dohyo-iri d'Umegatani II seraient les bienvenues.

Terarno
08/10/2005, 16h33
Perso je n'ai que ça à proposer, et je ne sais pas si c'est le I ou le II :

http://www7.city.toyama.toyama.jp/jiman/celebrity/img/umegatani01.jpg

Kaiomitsuki
09/10/2005, 18h53
Perso je n'ai que ça à proposer, et je ne sais pas si c'est le I ou le II
C'est bien le II

Kaiomitsuki
09/10/2005, 19h06
et voici d'autres photos issues de l'article de Sumofanmag

http://www.sumofanmag.com/content/Issue_1/story_images/Issue1/Rikishi_of_Old/umegatani_1-180.jpg

http://www.sumofanmag.com/content/Issue_1/story_images/Issue1/Rikishi_of_Old/hitachiyama_intai-540.jpg
à droite, avec également à gauche Tachiyama (22e yokozuna) et Hitachiyama (19e yokozuna) au milieu, en 1914.

http://www.sumofanmag.com/content/Issue_1/story_images/Issue1/Rikishi_of_Old/umegatani_intai540.jpg
en 1915 lors de son Intai avec à gauche Tachiyama et à droite Otori (?) 24e yokozuna