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Afficher la version complète : Sumo - MON : Le bizutage existe aussi



Derfel
15/04/2009, 15h30
C'est le titre d'un tout petit article sur le site de l'équipe.fr.
C'est dommage de toujours parler du sumo en mal. Je dois dire que cela m'exaspère de parler de ces choses là et de laisser passer le yusho de Kotooshu, en tant que premier vainqueur européen.
:evil:
http://www.lequipe.fr/Aussi/breves2009/20090415_114836_le-bizutage-existe-aussi.html

toonoryu
15/04/2009, 15h51
D'autant que l'on parle ici de kawaigari, qui se traduit essentiellement par du butsukari-geiko, accompagné de rudesses bien décrites tant par Takamiyama que par Akebono. Cela endurcit le lutteur et lui forge le caractère (et fait partir les éléments les plus faibles par un processus de sélection naturelle qui, quelque part, leur est bénéfique à eux aussi). Toutes ces séances ne sont pas conduites avec la stupidité qui caractérisa celle de la malheureuse affaire de la Tokitsukaze-beya...

pereboulon
15/04/2009, 16h47
L'article aurait pu s'intituler "le bizutage existe surtout en sumo" tant cette discipline est rude et l'obligation de faire le tri impérieuse. Il est bien évident qu'un article de 5 lignes ne peut pas expliquer ça (pour autant que le journaliste le sait).

Kotononami
16/04/2009, 13h07
Lci.fr relaye également les déclarations d'Hakuho :arrow: http://tf1.lci.fr/infos/monde/asie/0,,4382794,00-le-bizutage-du-scandale-.html

Kaiomitsuki
16/04/2009, 15h09
Lci.fr relaye également les déclarations d'Hakuho :arrow: http://tf1.lci.fr/infos/monde/asie/0,,4382794,00-le-bizutage-du-scandale-.html
A noter que sur le site de lci.fr il y a possibilité de laisser des commentaires... Alors allez y lachez vous sur les commentaires... Il faut redorer l'image du Sumo car c'est vrai qu'à chaque fois qu'on parle de Sumo dans les médias français c'est en mal :evil: !!!!

Info-Sumo
16/04/2009, 15h16
D'autant que l'on parle ici de kawaigari

J'ai déjà vu cette erreur ici: c'est kowagari de l'adjectif kowai (peur).
kawaigaru: aimer, chérir, choyer
kowagaru: redouter, craindre, avoir peur

toonoryu
16/04/2009, 16h23
D'autant que l'on parle ici de kawaigari

J'ai déjà vu cette erreur ici: c'est kowagari de l'adjectif kowai (peur).
kawaigaru: aimer, chérir, choyer
kowagaru: redouter, craindre, avoir peur

Ben non, justement, c'est le terme que j'ai toujours vu employé dans ce contexte. Je n'ai aucune notion de japonais, mais peut-être l'analogie est-elle aussi en rapport, mais c'est surtout une forme de "second degré" à la japonaise, j'imagine. Je me permets de reproduire les passages concernés dans les livres que j'ai pu traduire (de l'anglais)


Frapper ou rudoyer un jeune dans le sumo, chose plus commune quand j’ai débuté que cela ne peut l’être aujourd’hui, est dénommé kawaigatte, du verbe kawaigaru qui signifie traiter avec amour et affection. Que le monde du sumo ait retourné l’usage de ce mot n’est pas aussi contradictoire que cela pourrait bien apparaître au premier abord et représente un exemple de la philosophie qui soustend tant de choses dans la vie de la heya. Bien qu’il puisse y avoir des exceptions dans toute heya, un oyakata ou un lutteur ancien ne frappe pas un jeune deshi juste par méchanceté ou parce qu’il ne l’aime pas. Le but – mis à part les cas de punitions – est de le mettre en colère, d’attiser les flammes de sa combativité ; de le forcer à tout donner en le poussant au-delà de ce qu’il croit qu’il peut supporter ; de construire son envie de devenir sekitori et, si possible, yokozuna. C’est une forme d’encouragement qui, si elle est bien rude, est une preuve d’attention, pas de méchanceté. Dans cette optique, l’emploi du terme kawaigatte semble moins incongru. Le kawaigatte, comme le keiko lui-même, l’accent mis sur les bonnes manières, l’étiquette, et tous les autres aspects difficiles de la vie de la heya, ont pour but de bâtir l’état d’esprit assez unique qui seul peut produire de bons lutteurs et d’honnêtes hommes. J’ai mis pas mal de temps à comprendre tout cela, alors que je contemple le passé depuis mon statut de sekitori avec une assise assez confortable. [Takamiyama]

Les sessions prolongées jusqu’aux larmes de butsukari-geiko et de bastonnades au shinai sont toutes deux connues sous le terme de kawaigari, ou ‘tendre preuve d’amour’. C’est certain, les « vrais mecs » dans beaucoup de cultures ont cette façon d’exprimer l’amour, et comme le sumo représente le Japon, il est tout aussi évidemment hypermasculin. Mais cette constatation de Chad sur la culture masculine au Japon est d’autant plus forte qu’il vient de la campagne d’O’ahu, ou les gens s’embrassent plutôt que de se serrer la main, et disent ‘je t’aime' avec aussi peu de formalisme. La plupart des Japonais prononcent très rarement les mots « Je t’aime », et s’embrasser en public – même entre amoureux à l’aéroport ou dans une gare – ne se fait tout simplement pas.
Quand c’est indéniablement le moment d’exprimer l’amour, les gens peuvent se sentir totalement mal à l’aise et évitent l’expression en se taquinant l’un l’autre à la place et en gloussant de l’instant pour le faire passer. « Tu es affreux », à force de remplacer si souvent « Je t’aime », finit par dire la même chose, et comme les protagonistes le savent, les gloussements doivent suivre pour conjurer toute véritable réponse émotionnelle.Quand Chad commence enfin à comprendre que la plupart des garçons à la heya l’ont accepté et que leurs railleries au sujet de ses longues jambes sont en fait affectueuses, il commence, pour la première fois, à se sentir chez lui. Et après tout, le kawaigari physique diffère assez peu de la façon dont l’attention peut être manifestée au foyer des Rowan. Kawaigari et raclées de Maman : tous deux sont destinés à le rendre meilleur. [Akebono]

Info-Sumo
16/04/2009, 18h17
Dans ce cas, cela relèverait plus de la boutade "je t'en fais baver parce que je t'aime bien", un peu facile pour faire passer toutes sortes de pratiques dures, mais le sentiment du rikishi doit à mon avis, être certainement plus proche de la crainte "kowagari" qu'autre chose quand il s'agit de se prendre des coups de shinai dans le dos.
Les évènements tragiques d'il y a deux ans ont maleureusement montré que certains oyakata aimaient beaucoup trop leurs deshi :wink: au point de les laisser pour mort. Je ne pense pas que les juges auraient accepté de parler de "kawaigari" dans ces cas là.
Faut-il retenir la boutade ou le sentiment réel éprouvé par le rikishi? je pencherais plutôt pour le second.

asakusa
16/04/2009, 20h37
Voir aussi dans la même veine :
http://www.aujourdhuilejapon.com/actualites-japon-au-japon-bizutage-et-violence-dans-le-monde-du-sumo-6364.asp?1=1

J'ai essayé de mettre un commentaire sur le site de LCI mais je me suis fait jeter deux fois. SABOTAGE ! :x

toonoryu
17/04/2009, 11h42
Très bien ton commentaire, qui tranche avec certains raccourcis de gens qui ne connaissent manifestement pas leur affaire, tant sur les sujet DES formes de bizutage (pas mal de noms et de formes différents donnés à des rites initiatiques, qui ont toujours existé dans toutes les sociétés et existeront toujours, ce qui n'excuse pas la débilité et l'ineptie de certains) que sur celui du sumo (les poncifs habituels y passent, mais là c'est se battre contre des moulins à vent que de vouloir les modifier...).

asakusa
17/04/2009, 19h25
Merci Toon, mais je n'ai pas l'impression que ça ait infléchi d'un iota les avis des internautes ! :(

Miyabiyama
18/04/2009, 00h02
mais là c'est se battre contre des moulins à vent que de vouloir les modifier...).

Etant également fan de bodybuilding, force athlétique, et autres sports de fontes, j'ai moi-même toujours eu à me battre contre ces mêmes moulins à vent.

Toujours les mêmes idées reçues qui reviennent, c'est assez fatiguant.

Info-Sumo
18/04/2009, 00h46
Je ne pense pas qu'il y ait autant d'idées reçues que ça tant le Japon et les sports japonais sont méconnus des occidentaux.
Je ne vois pas en quoi il serait mauvais de décrire la réalité de la vie dans les heya - Hakuhô l'a fait dans cet article - et c'est un bien.
Il faut une bonne fois pour toute dire STOP à toutes ces dérives qui font qu'un oyakata et ses sbires ont toute puissance sur des jeunes qui ne souhaitent qu'une chose, progresser dans leur façon de pratiquer le sumo.

La NSK et les heya ont bon dos de décrire cela comme une façon de les faire progresser (les jeunes), de leur prodiguer un entrainement "à la dure", et malheureusement ne posent pas de limites à ces entrainements "à la dure". Et tout devient possible, on l'a vu.

Le sumo pro peut exister sans ces dérives, mais les dérives doivent être aussi rapportées par la presse. Je souhaite simplement que les résultats sportifs dans cette discipline le soient aussi de la même manière mais malheureusement ce n'est pas le cas, sauf sur les sites spécialisés comme celui-ci.

Satori
18/04/2009, 01h48
Je trouve que tu as tout à fait raison.

J'essayais d'expliquer la même chose à une amie complètement candide vis à vis du Sumo, qui m'a fait parvenir un article à propos du bizutage dans "Bordeaux 7", un magazine local.

Travailler à la dure est une chose indispensable si l'on veut véritablement progresser dans quelque discipline que ce soit. Il faut même être allé au delà de ce que l'on pensait être ses propres limites, pour apprendre et grandir dans une discipline physique, cela fait passer un cap et donne un recul essentiel vis à vis de notre véritable potentiel.

Mais en effet, tout est dans la limite à ne pas franchir et dans la bonne intelligence de l'enseignement et de la méthode, même si celle ci n'est pas nécessairement évidente au premier coup d'oeil ou pour l'élève lui même.

Je me rappelle de séances terribles durant lesquelles je me questionnais réellement sur leur sens et mon envie de faire ça, d'avoir à subir ça. Avec le recul et l'expérience, je réalise tout ce que ces séances m'ont apporté, je réalise la difficulté du dosage pour l'enseignant, et j'éprouve de la satisfaction d'avoir tant appris, et énormément de reconnaissance... Mais j'ai aussi conscience de la chance que j'ai eu de tomber sur des enseignants aussi lucides et consciencieux.

Ce que tu pointes me parait donc être exactement la chose la plus importante : la limite. Un rikishi ne deviendra jamais un grand rikishi s'il n'a pas souffert au delà de ce qu'il pensait supportable, physiquement et mentalement, et passé le cap en continuant malgré tout.

Mais l'enseignant a une grande responsabilité et se doit de trouver la juste mesure pour ne pas aller trop loin. C'est là que tout bascule, c'est la clé de voute, et je pense que cette limite est difficile à trouver. Cela dit, si l'élève a vraiment été battu à coups de batte, ça parait très difficile à justifier, même avec les meilleures intentions du monde, et il ne faut pas être Einstein pour le comprendre.

Quant à expliquer ces notions là au grand public... Il est parfois difficile d'expliquer la notion de séance "dure" à un sportif occasionnel, quiconque ne s'étant jamais rudoyé dans sa pratique ayant du mal à saisir la logique de se faire mal pour progresser, alors espérer expliquer les notions fondamentales du Sumo à des personnes peu ou pas réceptives, ça m'échappe un peu. Chacun son truc après tout, il ne me parait pas nécessaire que tout le monde aime et comprenne le Sumo, ses rites et ses "bizarreries" aux yeux du quidam...

Satori

Salamandre
23/04/2009, 11h38
Je crois qu’un des problèmes fondamentaux du bizutage ou des traitements « à la dure » vient du regard des gens qui l’ont subit et qui s’en sont sortis.
Si on analyse ce mode de fonctionnement à travers le crible de la psychologie de bazar, on s’aperçoit assez rapidement que deux options s’offrent à la victime :
- La première consiste à voir le côté valorisant de s’en être sorti et d’avoir surmonté les épreuves imposées.
- La seconde est que putain merde, je m’en suis pris plein la gueule par des mecs plus balaises que moi je suis vraiment un minus.
Au final, il est plus valorisant de trouver le positif de ce genre d’expérience. De se dire que c’était pour son bien, que le mal en valait la peine, avec souvent un regard condescendant pour ceux qui n’ont pas bien supporté.

Ce qui est le plus frappant, c’est que ceux qui ont subi cela ont une forte tendance à reproduire le même schéma. Et que ce genre de choses continue inlassablement.
De même que les enfants battus pensent, presque tous, qu’ils le méritaient et que c’était pour leur bien puis, deviennent des parents qui frappent, le bizuté devient bizuteur à son tour.

Ce mode de fonctionnement correspond sans doute très bien au monde du sumo, ou encore à la société japonaise, ou même à peu prêt à tout le monde. C’est aussi une histoire du plus fort qui impose ce que bon lui semble à celui qui est plus faible.